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NOTES ET ÉCLAIRCISSEMENTS.

cette lumière de la vérité dont l’être qu’on appelle homme est éclairé. Mais celui qui m’écoute, s’il voit aussi les mêmes choses du regard simple et secret de l’Âme, les apprend réellement, non de mes paroles, mais de sa propre contemplation. Ce n’est pas moi qui, même en disant la vérité, la lui enseigne, puisqu’il la voit. Il est instruit, non par mes discours, mais par les choses mêmes, Dieu les dévoilant au dedans de lui. » (De Magistro.)

Fénelon, s’inspirant de saint Augustin, dit de même dans un passage bien connu :

« À la vérité, ma raison est en moi : car il faut que je rentre sans cesse en moi-même pour la trouver ; mais la raison supérieure qui me corrige dans le besoin, et que je consulte, n’est point à moi et elle ne fait pas partie de moi-même. Cette règle est parfaite et immuable : je suis changeant et imparfait. C’est un maître intérieur qui me fait croire, qui me fait douter… Ce maître est partout, et sa voix se fait entendre d’un bout de l’univers à l’autre, à tous les hommes comme à moi[1]. » (De l’Existence de Dieu, 1re partie, chap. II.)

Nous ajouterons à ces rapprochements une dernière remarque. La distinction que Plotin établit dans le § 12, p. 50, entre la vertu active, qui se rapporte à la raison discursive, et la vertu contemplative, qui se rapporte à l’intelligence, est encore empruntée à la doctrine d’Aristote, comme nous l’expliquons plus loin dans la Note sur le livre iv.

8. Conscience.

Dans les facultés dont nous venons de parler, nous n’avons pas nommé la conscience. C’est que Plotin n’en fait pas une faculté à part. En faut-il conclure qu’il n’en admet pas réellement l’existence ? Ce serait une erreur, et nous sommes étonnés de voir M. Chauvet, dans son remarquable ouvrage Des théories de l’Entendement humain dans l’antiquité (p. 537-538), faire à ce sujet entre la doctrine d’Aristote et celle de Plotin une distinction qui ne nous paraît pas fondée. Voici comment il s’exprime :

« D’où vient que Plotin, qui explique si bien la condition essen-

  1. Malebranche a dit de même : « C’est le Verbe divin qui nous éclaire par les idées intelligibles qu’il renferme : car il n’y a point deux ou plusieurs sagesses, deux ou plusieurs raisons universelles. La vérité est immuable, nécessaire, éternelle, la même parmi nous et les étrangers. Si tous les hommes ne sont pas également éclairés, c’est qu’ils sont inégalement attentifs (Entretiens métaphysiques, III, § 4.)