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PREMIÈRE ENNÉADE, LIVRE I.

1° Le premier principe s’appelle le Premier, τὸ πρῶτον, le Bien, τὸ ἀγαθόν, parce que tout en dépend, tout y aspire, tout en tient l’existence, la vie et la pensée (t. I, p. 109, 114, 118). Il s’appelle aussi l’Un, τὸ ἕν, le Simple, τὸ ἀπλουν, l’Absolu, τὸ αὔταρϰες, l’Infini, τὸ ἄπειρον, qui a manifesté sa puissance en produisant tous les êtres intelligibles (t. I, p. 112, 254, 264, 273, 285).

2° Le second principe est l’Intelligence, νοῦς, qui embrasse dans son universalité toutes les intelligences particulières. En se pensant elle-même, l’Intelligence possède toutes choses, elle est toutes choses, parce qu’en elle le sujet pensant, l’objet pensé et la pensée elle-même sont identiques[1] (t. I, p. 44, 118, 260, 273).

Ses idéees, ἰδέαι, sont les formes pures, εἴδη, types de tout ce qui existe ici-bas dans le monde sensible, les essences, οὐσίαι, les êtres réels, ὄντως ὄντα, les intelligibles, νοητά[2] ; elles composent le monde intelligible, ϰόσμος νοητός, (t. I, p. 279).

3° Le troisième principe est l’Âme universelle, ἡ ψυχὴ ὅλη, ou l’Âme du monde, ἡ ψυχὴ τοῦ ϰόσμου, dont procèdent toutes les âmes particulières (t. I, p. 44).

Il y a en elle deux parties : la Puissance principale de l’Âme, τὸ ἡγοῦμενον τῆς ψυχῆς[3], ou l’Âme céleste, ἡ ψυχὴ οὐρανία, qui contemple l’Intelligence et en reçoit les formes (t. I, p. 119, 150, 191-193, 263, 266, 276) ; la Puissance inférieure de l’Âme, τῆς ψυχῆς ἡ δυνάμις ἡ ἥττων, appelée Puissance naturelle et génératrice, ἡ φυσιϰή δυνάμις ϰαὶ γεννέτιϰη, Raison totale de l’univers, ὁ λόγος τοῦ παντὸς ὅλος, parce qu’elle transmet à la matière les raisons séminales qui

  1. Voy. p. 349.
  2. La doctrine de Plotin sur les idées diffère essentiellement de celle de Platon, comme il est facile de le reconnaître en lisant le livre vii de l’Ennéade V, et le livre vii de l’Ennéade VI. M. Ravaisson signale cette différence dans les termes suivants : « Au-dessus du monde sensible, il y a le monde intelligible, composé des formes pures ou idées de tout ce que le premier renferme. Mais ce n’est plus ce monde de prototypes, de modèles semblables aux choses sensibles, tel qu’il semblait que Platon l’eût conçu ; contre-épreuve fidèle, obtenue par la plus simple des abstractions, du monde réel où nous vivons. C’est le monde que forment des unités où se trouvent en essence, concentrées dans la simplicité incorporelle, les choses que le monde sensible nous présente étendues et dispersées dans l’espace et le temps... Les idées étaient chez Platon des formes abstraites, des entités logiques, inertes et inanimées : chez Plotin ce sont plus que des âmes, ce sont des intelligences. Qui ne voit ce que doit ici le Platonisme nouveau à l’influence féconde de la philosophie péripatéticienne ? » (Essai sur la Métaphysique d’Aristote, t. II, p. 395, 398.)
  3. Voy. Platon, Timée, p. 41.