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DEUXIÈME ENNÉADE.

ϰαὶ εἰδώλου). Si l’on parle de Conception (ἐννόημα), qu’on explique d’abord d’où vient ce nom ; ensuite, qu’on montre comment une Conception peut constituer un être réel, à moins qu’on ne donne à cette Conception une force créatrice ? Mais quelle force créatrice peut se trouver dans cet être imaginaire ? Les Gnostiques disent que cette Image [le Démiurge] a d’abord été produite et que d’autres images ont été produites après elle[1] ; mais ils se permettent de le dire sans le prouver. Comment, par exemple, le feu a-t-il été produit d’abord [et les autres choses ensuite][2] ?

XII. Comment cette Image nouvellement formée [le Démiurge] a-t-elle entrepris de créer par le souvenir des choses qu’elle connaissait ? Car précédemment elle n’existait pas, par conséquent, ne pouvait rien connaître, non plus que la mère qu’on lui donne [la Sagesse]. N’est-il pas d’ailleurs étonnant que, quoique les Gnostiques ne soient pas descendus sur la terre comme des images d’âmes (εἴδωλα ψυχῶν), mais comme de véritables âmes (ἀηθιναὶ ψυχαὶ)[3], cependant à peine un ou deux d’entre eux parviennent à se détacher du monde [sensible], et, en recueillant leurs souvenirs, à se rappeler quelques-unes des choses qu’ils connaissaient antérieurement, tandis que cette Image [le Démiurge], aussi bien que sa mère [la Sagesse], qui est une image matérielle (εἴδωλον ὑλιϰὸν), a été capable de concevoir les choses intelligibles faiblement (ἀμυδρῶς ἐνθυμηθῆναι ἐϰεῖνα), comme disent les Gnostiques, mais dès sa naissance ? Non-seulement elle a conçu les choses intelligibles et s’est formé une idée du monde sensible d’après le monde intelligible, mais encore elle a su avec quels éléments elle devait produire le monde sensible.

  1. Cette phrase reproduit la dernière phrase du § 10, p. 288.
  2. Plotin revient plus bas sur cette question, p. 291.
  3. Plotin appelle véritables âmes les natures pneumatiques supérieures aux images d’âmes, c’est-à-dire, aux natures psychiques. Voy. la Note, p. 616-618.