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LIVRE NEUVIÈME.

une connaissance exacte, tandis que, en les supposant si nombreux, ils les rabaissent et les rendent semblables aux êtres inférieurs et sensibles. Il faut réduire au plus petit nombre possible les principes qui existent là-haut ; il faut reconnaître que le principe inférieur au Premier contient toutes les essences, et ne pas admettre qu’il y ait des intelligibles hors de ce principe, puisqu’il comprend tous les êtres, qu’il est l’Essence première, l’Intelligence première, et tout ce qu’il y a de beau au-dessous du Premier ; il faut enfin assigner à l’Âme le troisième rang. On doit ensuite expliquer les différences qu’il y a entre les âmes, soit par leurs divers états, soit par leur nature[1].

Au lieu de dénigrer des hommes divins[2], les Gnostiques devraient interpréter avec bienveillance les dogmes des anciens sages, leur emprunter ceux qu’ils ont raison de professer, tels que l’immortalité de l’âme, l’existence du monde intelligible, celle du Premier Dieu [du Bien][3], la nécessité pour l’âme de fuir le commerce du corps, et la croyance que séparer l’âme du corps c’est retourner de la génération à l’essence[4]. S’ils empruntent ces principes à Platon pour les développer avec clarté, ils font bien. S’ils s’en écartent, ils sont libres de dire ce que bon leur semble ; mais ce n’est pas par des injures et des sarcasmes dirigés contre les Grecs[5] qu’ils doivent établir leur propre doctrine


    tèmes gnostiques est de supposer que Dieu se manifeste par un grand nombre de puissances qui forment une hiérarchie d’Éons : Valentin les appelle les formes de Dieu, μορφαὶ τοῦ θεοῦ, les noms de Celui qui n’a pas de nom, ὀνόματα τοῦ ἀνωνόμαστοῦ, expression que Plotin semble rappeler par le verbe ὀνομάζοντες. L’ensemble des Éons constitue le Plérôme (Voy. la Note, p. 522), et la connaissance du Plérôme est la Gnose (Voy. p. 285, note 2).

  1. Sur les causes des différences qui existent entre les âmes, Voy. Enn. IV, liv. iii, § 8, 15.
  2. Ces hommes divins sont Pythagore et Platon. Voy. plus haut, p. 28.
  3. Voy. la Note, p. 321.
  4. Voy. § 17, p. 305.
  5. Plotin oppose ici, comme plus haut (p. 271), l’antique sagesse des Grecs à la science parfaite que les Gnostiques se