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LIVRE HUITIÈME.


DE LA VUE.
POURQUOI LES OBJETS ÉLOIGNÉS NOUS PARAISSENT-ILS PETITS
[1].


I. D’où vient que, dans l’éloignement, les objets visibles paraissent plus petits, et que, bien que séparés par un grand espace, ils semblent être voisins, tandis que, s’ils sont près de nous, nous les voyons avec leur vraie grandeur et leur vraie distance ?

Si les objets paraissent plus petits dans l’éloignement, est-ce parce que la lumière demande à être rassemblée vers l’œil et accommodée à la grandeur de la prunelle[2] ; que plus la matière de l’objet visible est éloignée, plus la forme paraît s’en séparer en arrivant à l’œil ; et que, comme il y a une forme de la quantité et de la qualité, c’est la raison [la forme] de cette dernière qui seule arrive à l’œil ?

Est-ce parce que nous ne sentons la grandeur que par le passage et l’introduction successive de ses parties une à une[3], qu’elle doit, par conséquent, être placée à notre portée et près de nous pour que nous en déterminions la quantité ?

Est-ce parce que nous ne voyons la grandeur que par accident, et que nous percevons d’abord la couleur ? En ce cas, un objet se trouve-t-il près de nous, nous voyons

  1. Pour les Remarques générales, Voy. la Note sur ce livre à la fin du volume.
  2. Cette opinion paraît avoir été professée par les Stoïciens.
  3. C’était l’opinion des Épicuriens.