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XXXIII
PRÉFACE.

Cyrille[1] ont également mis plus d’une fois notre philosophe à contribution. Au moyen âge, les plus graves docteurs de la Scolastique, Albert le Grand et S. Thomas d’Aquin, en étudiant et en discutant les écrits péripatéticiens des philosophes arabes et juifs, étudient et discutent bien souvent les doctrines de Plotin lui-même, alliées à celles d’Aristote par plusieurs de ces philosophes, notamment par le célèbre Ibn-Gebirol, vulgairement connu sous le nom d’Avicebron[2]. C’est ce qui explique encore les traces d’idées néoplatoniciennes qu’on retrouve dans les écrits de Dante[3]. Enfin, sans parler de Marsile Ficin, qui tenta de faire revivre le Néoplatonisme au xve siècle, l’influence de cette philosophie s’est étendue si loin qu’elle s’est fait sentir jusque dans les ouvrages des écrivains les plus éminents des temps modernes, dans ceux de Bossuet, de Fénelon, de Malebranche, de Leibnitz[4]. Ce n’est pas que tous ces auteurs aient eu sous les yeux les écrits mêmes de Plotin ou de ses disciples ; mais, nourris comme ils l’étaient de la lecture des Pères de l’Église, dont plusieurs étaient platoniciens, et dont quelques-uns, comme on l’a vu, avaient fait à Plotin des emprunts directs, familiarisés d’ailleurs avec la théologie scolastique dans laquelle avait passé et s’était pour ainsi dire incorporée une grande partie des doctrines néoplatoniciennes, ils reproduisaient, même à leur insu, ces doctrines, dont le plus souvent ils ne soupçonnaient pas la source.

En résumé, détermination plus précise du véritable caractère de l’École néoplatonicienne et indication des sour-

  1. Contre Julien, liv. V, p. 145, liv. VIII, p. 273-280.
  2. Voy., dans les Mélanges de Philosophie juive et arabe de M. S. Munk, le livre IV de la Source de la Vie, où Ibn-Gebirol reproduit presque littéralement plusieurs passages de Plotin. Voy. encore, dans l’Histoire de l’École d’Alexandrie par M. Vacherot (t. III, p. 86), l’analyse de la Théologie apocryphe et du célèbre traité Des Causes.
  3. Voy. p. 450 (notes 1 et 2) et p. 455 (note 1).
  4. Voy. les Notes sur les livres I et VIII de la Ire Ennéade.