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DEUXIÈME ENNÉADE.

L’univers a une vie universelle et parfaite, parce que les principes excellents [les âmes des astres] produisent des choses excellentes, c’est-à-dire, ce qu’il y a d’excellent dans chaque chose[1]. Ces principes sont subordonnés à l’Âme qui gouverne l’univers, comme des soldats le sont à leur général ; aussi Platon dit-il qu’ils forment le cortége de Jupiter[2] quand celui-ci s’avance à la contemplation du monde intelligible[3].

Les êtres qui ont une nature inférieure [aux âmes des astres], les hommes tiennent le second rang dans l’univers, et y jouent le même rôle que remplit en nous la seconde puissance de l’âme [la raison discursive]. Les autres êtres [les brutes] tiennent à peu près le même rang qu’occupe en nous la dernière puissance de l’âme [la puissance végétative] : car en nous toutes les puissances ne sont pas égales[4]. Donc tous les êtres qui sont dans le ciel ou qui se trouvent distribués dans l’univers sont des êtres animés et tiennent leur vie de la Raison totale de l’univers [parce qu’elle contient les raisons séminales de tous les êtres vivants]. Une des parties de l’univers, quelle que soit sa grandeur, n’a pas la puissance d’altérer les raisons ni les êtres engendrés avec le concours de ces raisons. Elle peut rendre ces êtres meilleurs ou pires, mais non leur faire perdre leur nature propre. Quand elle les rend pires, c’est qu’elle affaiblit, soit leur corps, soit leur âme : ce qui a lieu lorsqu’un accident devient une cause de vice pour l’âme qui partage les passions du corps [l’âme sensitive et végétative] et qui est donnée au principe inférieur [à l’animal] par le principe supérieur [l’âme raisonnable], ou bien lorsque le corps par sa mauvaise organisation entrave les actes où l’âme a besoin de son concours : il ressemble alors

    rang intermédiaires sont les hommes. Voy. Enn. III, liv. i, § 8-10.

  1. Voy. Enn. IV, liv. iv, § 39.
  2. Jupiter est l’Âme universelle.
  3. Voy. plus haut, p. 177, note 2.
  4. Voy. Enn. III, liv. iv, § 3.