Page:Plotin - Ennéades, t. I.djvu/322

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
181
LIVRE TROISIÈME.

Dieu, si l’on fait entrer dans sa substance l’Âme qui en est séparable. Le reste constitue ce Démon que Platon nomme le grand Démon[1], et qui a d’ailleurs toutes les passions propres aux démons.

X. S’il en est ainsi, il faut accorder que les astres annoncent les événements, mais non qu’ils les produisent, pas même par leur âme unie à leur corps. Ils ne produisent que les choses qui sont des passions de l’univers, et cela par leur partie inférieure [leur corps][2]. En outre, il faut admettre que l’âme, même avant de venir dans la génération, en descendant ici-bas, apporte quelque chose qu’elle a par elle-même : car elle n’entrerait pas dans un corps si elle n’avait de grandes dispositions à pâtir [à partager les passions du corps][3]. Il faut également admettre qu’en passant dans un corps l’âme est exposée à des accidents, parce qu’elle se trouve soumise au cours de l’univers ; qu’enfin ce cours même contribue à produire ce que l’univers doit accomplir : car les choses qui se trouvent comprises dans le cours de l’univers y jouent le rôle de parties.

XI. Il faut aussi réfléchir que les impressions qui nous viennent des astres ne sont pas en nous, qui les recevons, telles qu’ils les produisent. S’il y a du feu en nous, il est plus faible que dans le ciel ; la sympathie, en se corrompant dans celui qui la reçoit, engendre une affection déshonnête ; le principe irascible, en sortant des bornes du courage, produit l’emportement ou la lâcheté ; l’amour du beau et de l’honnête devient la recherche de ce qui n’en a que les apparences. La pénétration d’esprit, en se dégradant, constitue la ruse qui cherche à l’égaler sans y pouvoir parvenir. Ainsi toutes ces dispositions deviennent mauvaises en nous sans l’être dans les astres. Car toutes les

  1. Voy. Platon : Banquet, p. 122 ; Timée, p. 89.
  2. Voy. Enn. IV, liv. iv, § 39.
  3. Voy. Enn. III, liv. i, § 2.