Page:Plotin - Ennéades, t. I.djvu/316

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
175
LIVRE TROISIÈME.

ciel, ou qui, après y avoir été tracées, seraient sans cesse en mouvement, de telle sorte que, tout en remplissant une autre fonction dans l’univers, elles auraient cependant une signification (σημασία)[1]. C’est ainsi que, dans un être animé par un principe unique, on peut juger d’une partie par une autre partie ; en considérant, par exemple, les yeux ou quelque autre organe d’un individu, on connaît quel est son caractère, à quels périls il est exposé, comment il peut y échapper. De même que nos membres sont des parties de notre corps, nous sommes nous-mêmes des parties de l’univers. Les choses sont donc faites les unes pour les autres. Tout est plein de signes, et le sage peut conclure une chose d’une autre. Aussi beaucoup de faits habituels sont-ils prévus par tous les hommes. Tout est coordonné dans l’univers (σύνταξις μία)[2].

  1. « Plotin développe cette pensée dans l’Ennéade III (liv. i, § 6) : « Les astres concourent par leur mouvement à la conservation de l’univers, mais ils remplissent en même temps un autre rôle : ils servent de lettres pour ceux qui savent déchiffrer cette espèce d’écriture, et qui, en considérant les figures formées par les astres, y lisent les événements futurs d’après les lois de l’analogie, comme si, en voyant un oiseau voler haut, on en concluait qu’il annonce de hauts faits. » Voy. la Note sur ce livre, à la fin du volume.
  2. Voy. Enn. IV, liv. iv, § 33. On trouve les mêmes idées dans Sénèque : « Non a Deo pennæ avium reguntur, nec pecudum viscera sub ipsa securi formantur. Alia ratione fatorum series explicatur, indicia venturi ubique præmittens, ex quibus quædam nobis familiaria, quædam ignota sunt. Quidquid fit, alicujus rei signum est. Fortuita et sine ratione vaga, divinationem non recipiunt : Cujus rei ordo est, etiam prœdictio est... Nullum animal est, quod non motu et occursu sue prœdicat aliquid. Non omnia scilicet, sed quædam notantur. Auspicium est observantis : ad eum itaque pertinet qui in ea direxerit animum. » (Questions Naturelles, II, 32). Leibnitz a été conduit à des idées analogues par sa théorie des monades : « Cette liaison ou cet accommodement de toutes les choses créées chacune à chacune, et de chacune avec toutes les autres, fait que chaque substance simple a des rapports qui expriment toutes les autres, et