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LIVRE TROISIÈME.

a plus : on prétend que certains astres sont malfaisants, que d’autres sont bienfaisants, et que cependant les premiers nous accordent souvent des bienfaits, tandis que les seconds deviennent souvent nuisibles. On dit qu’ils produisent des effets différents selon qu’ils se regardent (ἀλλήλους ἱδόντες)[1] ou ne se regardent pas, comme s’ils ne s’appartenaient pas à eux-mêmes et qu’ils fussent tels ou tels selon qu’ils se regardent ou qu’ils ne se regardent pas. Un astre est bon quand il regarde celui-ci, et il change quand il regarde celui-là. Il regarde de telle ou telle manière (ἄλλως ὅρᾷ)[2] quand il est dans tel ou tel aspect (εἰ ϰατὰ σχῆμα τόδε ἡ ὄψις)[3]. Enfin tous les astres ensemble exercent une influence mêlée qui diffère de l’influence propre à chacun d’eux, comme plusieurs liqueurs forment un mélange qui possède d’autres qualités que chacune d’elles[4]. En présence de ces assertions et d’autres de même espèce, il importe d’examiner chacune avec soin. Voici comment il nous semble convenable de commencer.

II. Faut-il croire que les astres sont animés ou qu’ils sont inanimés ?

S’ils sont inanimés, ils ne pourront que répandre le froid ou le chaud, en admettant toutefois qu’il y en ait de froids[5]. Dans ce cas, ils se borneront à modifier la nature de notre corps, ils n’exerceront sur nous qu’une action corporelle (φορὰ σωματιϰή) ; ils ne produiront pas une grande diversité

  1. Macrobe, In Somn. Scipionis : « ut Mars adspiciat ad lunam. »
  2. Cicéron, De Divinatione, I, 39 : « Quid astrologus habet cur Stella Jovis, aut Veneris, conjuncta cum Luna ad ortus puerorum salutaris sit, Saturni Martisve contraria ? »
  3. On nomme aspect la position de deux planètes l’une par rapport à l’autre : elles peuvent être, soit en conjonction, soit en opposition, soit en aspect trine, τρίγωνος (à la distance de quatre signes du zodiaque), soit en quadrat, τετράγωνος (à la distance de trois signes).
  4. Julius Firmicus, Astrol., II, 23 : « Si benevolæ et malevolæ stellæ pari radiatione respexerint, etc. » Pour plus d’éclaircissements, Voy. la Note sur ce livre, à la fin du volume.
  5. Voy. Ptolémée, Tetrabiblon, I, p. 17.