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LIVRE DEUXIÈME.

partout, qu’elle n’est pas divisée en parties, elle donne au ciel l’ubiquité autant que celui-ci peut y participer ; or il ne le peut qu’en parcourant tout. Si l’Âme restait immobile en un lieu, une fois que le ciel serait arrivé en ce lieu, il resterait immobile ; mais comme l’Âme est partout, il cherche l’atteindre partout. Ne peut-il donc jamais l’atteindre ? Au contraire, il l’atteint sans cesse. L’Âme, en l’attirant vers elle continuellement, lui imprime un mouvement continuel par lequel elle le porte, non vers un autre lieu, mais vers elle-même et dans le même lieu, non en ligne droite, mais circulairement, et lui permet ainsi de la posséder dans tous les lieux qu’elle parcourt. Si l’Âme se reposait, si elle était seulement dans le monde intelligible où tout reste dans le repos, le ciel serait immobile. Mais comme l’Âme n’est pas dans un lieu déterminé, qu’elle est tout entière partout, le ciel se meut par tout l’espace ; et comme il ne peut sortir de lui-même, il doit se mouvoir circulairement.

II. De quelle manière se meuvent les autres êtres ? Chacun d’eux n’est pas le tout, mais une partie, et par conséquent se trouve renfermé dans un lieu particulier. Le ciel au contraire est le tout ; il est le lieu qui n’exclut rien : car il est l’univers. D’après quelle loi les hommes se meuvent-ils ? Chacun d’eux, considéré dans la dépendance où il se trouve à l’égard de l’univers, est une partie du tout ; considéré en lui-même, il est un tout.

Si le ciel possède l’Âme partout où il est, quel besoin a-t-il de se mouvoir circulairement ? C’est que l’Âme n’étant pas seulement dans un lieu déterminé, le monde ne désire pas la posséder seulement dans un lieu déterminé[1]. En outre, si la puissance de l’Âme se porte autour du milieu,

  1. Il y a dans le texte seulement : ἢ ὅτι μὴ μόνον ἐϰεῖ. Pour suppléer les mots sous-entendus, il faut se reporter à la dernière phrase du § 1.