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DEUXIÈME ENNÉADE.

dividualité du ciel et des astres comme perpétuelle aussi bien que leur forme ?

Si nous attribuons l’incorruptibilité du ciel à ce qu’il comprend toutes choses dans son sein[1], à ce qu’il n’existe aucune autre chose en laquelle il puisse se changer, à ce qu’il ne saurait rencontrer rien d’extérieur qui puisse le détruire, nous expliquerons par là d’une manière raisonnable l’incorruptibilité du ciel considéré comme tout, comme univers ; mais nous ne ferons pas voir clairement la raison de la perpétuité du soleil et des autres astres qui sont des parties du ciel au lieu d’être comme lui le tout, l’univers. Il semblera que les astres et le monde considéré comme univers ne doivent posséder qu’une perpétuité de forme comme le feu et les substances de même nature. Rien n’empêche en effet que le ciel, sans rencontrer rien d’extérieur qui le détruise, ne soit, par cela seul que ses parties se détruisent les unes les autres, soumis à une destruction perpétuelle et qu’il ne conserve rien d’identique que la forme ; dans ce cas, sa substance, étant dans un flux perpétuel, recevrait sa forme d’un autre principe, et nous verrions arriver dans l’animal universel ce qui a lieu dans l’homme, dans le cheval et dans les autres animaux : l’homme [considéré comme espèce] dure toujours, ainsi que le cheval, mais ce n’est pas toujours le même [individu] qui subsiste. [D’après cette hypothèse], il n’y aura pas dans l’univers une partie toujours permanente, comme le ciel, une autre sans cesse changeante, comme les choses terrestres ; toutes ces choses seront soumises à la même condition, ne différant entre elles que par leur durée plus ou moins longue, puisque les corps célestes sont plus durables. Si nous admettons que telle est la perpétuité propre à l’univers et à ses parties, notre opinion présentera

  1. C’était l’opinion d’Héraclite. Voy. Diogène Laërce, liv. ix, 8 ; Platon, Timée, p. 31 ; Aristote, Du Ciel, 1, 8, 9.