que le Mal se trouve dans le non-être, qu’il en soit en quelque sorte la forme, qu’il se rapporte aux choses qui s’y mêlent ou qui ont quelque communauté avec lui. Ce non-être n’est pas le non-être absolu[1] ; seulement il diffère de l’être, non pas comme en diffèrent le mouvement et le repos[2], qui se rapportent à l’être, mais comme l’image ou quelque chose de plus éloigné encore de la réalité. Dans ce non-être sont compris tous les objets sensibles, toutes leurs modifications passives ; ou bien, il est quelque chose d’inférieur encore, comme leur accident, ou leur principe, ou l’une des choses qui concourent à le constituer. Pour mieux déterminer le Mal, on peut se le représenter comme le manque de mesure par rapport à la mesure, comme l’indétermination par rapport au terme, comme le manque de forme par rapport au principe créateur de la forme, comme le défaut par rapport à ce qui se suffit à soi-même, comme l’illimitation et la mutabilité perpétuelle, enfin comme la passivité, l’insatiabilité et l’indigence absolues[3]. Ce ne sont pas là de simples accidents du Mal, c’est pour ainsi dire son essence même : quelque portion du Mal qu’on examine, on y découvre tout cela. Les autres objets, lorsqu’ils participent du Mal et lui ressemblent, deviennent mauvais sans être cependant le Mal absolu.
Toutes ces choses appartiennent à une substance : elles n’en diffèrent pas ; elles sont identiques avec elle et la constituent. Car si le mal se trouve comme accident dans un objet, il faut d’abord que le Mal soit quelque chose par lui-même, tout en n’étant pas une véritable essence. De même que, pour le bien, il y a le Bien en soi et le bien envisagé comme attribut d’un sujet étranger, de même, pour le mal, on distingue le Mal en soi et le mal comme accident.