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LIVRE HUITIÈME.

toutes choses, mais sans les posséder à la manière ordinaire], les choses qui subsistent en elle ne différant pas d’elle et n’étant pas non plus séparées entre elles : car chacune d’elles est toutes les autres[1], est tout et partout, quoiqu’elle ne se confonde pas avec les autres et qu’elle en reste distincte.

La puissance qui participe de l’Intelligence [l’Âme universelle][2] n’en participe pas de manière à lui être égale, mais seulement dans la mesure où elle est capable d’en participer : elle est le premier acte de l’Intelligence, la première essence que l’Intelligence engendre tout en restant en elle-même. Elle dirige vers l’Intelligence suprême toute son activité et ne vit en quelque sorte que par elle. Se mouvant hors d’elle et autour d’elle suivant les lois de l’harmonie, l’Âme universelle attache ses regards sur elle, et pénétrant par la contemplation jusqu’à ses profondeurs les plus intimes, elle voit par elle Dieu lui-même [le Bien]. C’est en cela que consiste la vie sereine et heureuse des dieux, vie où le mal n’a aucune place.

Si tout s’arrêtait là [et qu’il n’y eût rien au delà des principes décrits jusqu’ici], le mal n’existerait pas [il n’y aurait que des biens]. Mais il y a des biens du premier, du deuxième et du troisième rang. Tous se rapportent [il est vrai] au roi de toutes choses, qui est leur auteur et dont ils tiennent leur bonté ; mais les biens du second rang se rapportent [plus spécialement] au second principe ; les biens du troisième rang, au troisième principe[3].

III. Si ce sont là les êtres véritables, et si le Premier principe leur est supérieur, le Mal ne saurait exister dans de tels êtres, et bien moins encore dans Celui qui leur est supérieur : car toutes ces choses sont bonnes. Reste

  1. Voy. Enn. V, liv. i ; VI, liv. ix, § 2.
  2. On sait que le premier principe est le Bien ou l’Un, le deuxième l’Intelligence divine, le troisième l’Âme universelle.
  3. Voy. Platon, Lettre 2, p. 313.