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LIVRE QUATRIÈME.

c’est pour satisfaire, selon son pouvoir, les besoins du corps. Mais comme il est tout autre chose que le corps, il n’est jamais embarrassé de le quitter ; or, il le quittera quand la nature en aura marqué le moment. Il conserve d’ailleurs toujours la liberté de délibérer à cet égard[1]. Atteindre le bonheur sera son principal but ; toutefois, il accomplira aussi des actions qui n’auront pas directement pour objet sa fin, ni lui-même, mais le corps qui lui est uni : il soignera ce corps et il le soutiendra aussi longtemps qu’il lui sera possible. C’est ainsi qu’un musicien se sert de sa lyre aussi longtemps qu’il le peut ; dès qu’elle est hors d’usage, il la change, ou renonce à employer la lyre et à en jouer, parce qu’il peut désormais se passer de cet instrument ; le laissant à terre, il le regardera presque avec mépris, et chantera sans s’en accompagner. Cependant ce n’est pas en vain que cette lyre lui aura été donnée dans l’origine ; car il s’en sera souvent servi avec avantage.


  1. Il a déjà exprimé la même pensée ci-dessus, § 8. Pour la doctrine sur le suicide, Voy. le livre ix de cette même Ennéade.