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PREMIÈRE ENNÉADE.

thématiques afin de l’accoutumer à penser aux choses incorporelles, à croire à leur existence. Avide d’instruction, il les apprendra facilement. Comme il est déjà vertueux par sa nature, on n’aura qu’à l’élever à la perfection de la vertu. Après les mathématiques, on lui enseignera la Dialectique et on en fera un dialecticien parfait.

IV. Qu’est-ce donc que cette Dialectique, dont il faut ajouter la connaissance à ce qui précède ? C’est une science qui nous rend capables de raisonner de chaque chose, de dire ce qu’elle est, en quoi elle diffère des autres, en quoi elle leur ressemble, où elle est, si elle est une essence ; de déterminer combien il y a d’êtres véritables, quels sont les objets où se trouve le non-être au lieu de l’être véritable. Cette science traite aussi du bien et du mal, de tout ce qui est subordonné au bien et à son contraire, de la nature de ce qui est éternel et de ce qui ne l’est pas. Elle parle de toutes choses scientifiquement et non suivant la simple opinion. Au lieu d’errer dans le monde sensible, elle s’établit dans le monde intelligible ; elle concentre sur ce monde toute son attention, et, après avoir éloigné notre âme du mensonge, elle la nourrit dans le champ de la vérité[1]. Elle emploie alors la méthode platonicienne de division pour discerner les idées, définir chaque objet, s’élever aux premiers genres des êtres[2] ; puis, enchaînant par la pensée tout ce qui en dérive, elle poursuit ses déductions jusqu’à ce qu’elle ait parcouru le domaine de l’intelligible tout entier ; enfin, par une marche rétrograde, elle remonte au principe même d’où elle était d’abord partie[3]. Se reposant alors, parce que ce n’est que dans le monde intelligible qu’elle peut trouver le repos, n’ayant plus à s’occuper d’une multitude d’objets, parce qu’elle est

  1. Voy. Platon, Phèdre, p. 248.
  2. Voy. Platon, Politique, p. 262. Voy. aussi l’Enn. VI, liv. i, ii, iii.
  3. Voy. une application de cette méthode dans l’Enn. V, liv. i.