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LIVRE PREMIER.

cette partie commune que nous avons précédemment fait connaître[1].

X. Mais si nous sommes l’âme, il faudra donc admettre que, quand nous éprouvons les passions, l’âme les éprouve aussi ; que, quand nous agissons, l’âme agit. On peut dire que la partie commune est également nôtre, surtout tant que la philosophie n’a pas séparé l’âme du corps[2] : en effet, quand notre corps souffre, nous disons que nous souffrons. Nous désigne donc deux choses : ou l’âme en y joignant la partie animale, ou simplement la partie supérieure ; la partie animale, c’est le corps vivant. L’homme véritable diffère du corps : pur de toute passion, il possède les vertus intellectuelles, vertus qui résident dans l’âme, soit quand elle est séparée du corps, soit quand elle en est seulement séparable par la philosophie, comme elle l’est ici-bas : car, lors même qu’elle nous paraît tout à fait séparée, l’âme est toujours dans cette vie accompagnée d’une partie inférieure[3] qu’elle illumine[4]. Quant aux vertus qui consistent, non dans le bon usage de la raison, mais dans certaines mœurs, dans certains exercices, elles appartiennent à la partie commune ; c’est à elle seule aussi que les vices sont imputables, puisque c’est elle qui éprouve l’envie, la jalousie, les émotions d’une lâche pitié. Mais à qui rapporter les affections de l’amitié ? Les unes à la partie commune, les autres à la partie intime de l’homme [à l’âme pure].

XI. Dans l’enfance, les facultés qui appartiennent au composé s’exercent, mais le principe supérieur nous illumine rarement d’en haut. Quand il est inactif par rapport à nous, il dirige son action vers le monde intelligible ; il commence à être actif relativement à nous lorsqu’il s’avance

  1. Voy. § 7.
  2. Voy. Enn. I, liv. ii, § 5.
  3. Cette partie inférieure est la puissance sensitive et végétative. Voy. Enn. IV, liv. iii, § 19-23.
  4. Voy. Enn. II, liv. ix, § 3, 4, 11, 12.