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VIE DE PLOTIN

Longin, qui a dédié à Cléodame et à moi son livre De la Véhémence, m’appelle Malchus à la tête de cet ouvrage ; et Amélius a traduit ce nom en grec, comme Numénius a traduit celui de Maximus par Μεγάλος (grand).

[Voici la lettre d’envoi d’Amélius] :

« Amélius à Basile, salut.

Sachez-le bien, je ne voulais pas dire un mot de certaines personnes, honorables d’ailleurs, qui répètent, au point que vous dites en avoir les oreilles rebattues, que les doctrines de notre ami ne sont autres que celles de Numénius d’Apamée : car il est constant que ces reproches ne viennent que de l’envie qu’ils ont de faire briller leur talent oratoire ; poussés par le désir de déchirer Plotin, ils vont jusqu’à prétendre que ses écrits ne renferment que du bavardage, ne sont que des œuvres bâtardes et pleines d’hypothèses inadmissibles. Mais, puisque vous croyez qu’il faut profiter de l’occasion pour rappeler les dogmes que nous approuvons [dans ce système de philosophie], et pour honorer un aussi grand homme que notre ami Plotin en faisant mieux connaître sa doctrine, quoique je sache qu’elle est renommée depuis longtemps, je vous obéis et je viens, selon ma promesse, vous offrir cet ouvrage que j’ai fini en trois jours, comme vous le savez. Vous n’y trouverez point cet ordre ni ce choix de pensées que présente un livre composé avec soin : ce sont seulement des réflexions empruntées aux leçons [que Plotin nous a faites autrefois], et arrangées comme elles se sont présentées à mon esprit. Je réclame donc votre indulgence, d’autant plus que la pensée du philosophe que quelques gens traduisent à notre tribunal commun n’est pas aisée à saisir, parce qu’il exprime de plusieurs manières différentes les mêmes idées selon que cela se rencontre. Je sais que vous aurez la bonté de me réformer, si je m’éloigne des sentiments qui sont propres à Plotin. Accablé d’affaires, comme dit le tragique quelque part, je me vois forcé de me soumettre à la critique et de me corriger, si je viens à altérer la doctrine de notre chef. Vous voyez combien j’ai le désir de vous faire plaisir. Portez-vous bien. »