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PAR PORPHYRE.

l’état dans lequel il était lorsqu’il les écrivait. Les vingt et un premiers semblent indiquer un esprit qui n’a pas encore toute sa vigueur ni toute sa fermeté. Ceux qu’il a écrits dans le milieu de sa vie montrent que son génie était alors dans toute sa force. On peut regarder ces vingt-quatre livres comme parfaits, si l’on en excepte quelques passages. Les neuf derniers sont moins forts que les autres ; et de ces neuf, les quatre derniers sont les plus faibles.

VII. Plotin eut un grand nombre d’auditeurs et de disciples, que l’amour de la philosophie attirait à ses leçons. De ce nombre était Amélius d’Étrurie, dont le vrai nom était Gentilianus. Il voulait au reste qu’on remplaçât dans son nom la lettre l par la lettre r, qu’on l’appelât Amérius, de ἀμερία (indivisibilité)[1], et non Amélius, de ἀμελεία (négligence). Plotin avait aussi pour disciple très-assidu un médecin de Scythopolis[2] nommé Paulin, dont l’esprit était plein de connaissances mal digérées, et qu’Amélius appelait Miccalus [le petit][3].

Eustochius d’Alexandrie, également médecin, connut Plotin sur la fin de sa vie, et resta avec lui jusqu’à la mort de ce philosophe pour en prendre soin. Tout occupé de la seule doctrine de Plotin, il devint lui-même un vrai philosophe. Zoticus s’attacha aussi à lui. Celui-ci était critique et poëte en même temps : il corrigea les ouvrages d’Antimaque et il mit en très-beaux vers la fable de l’Atlantide. Sa vue baissa, et il mourut peu de temps avant Plotin. Paulin mourut aussi avant ce philosophe. Zéthus était un des disciples de Plotin ; il était originaire d’Arabie, et

  1. Suidas suppose faussement, pour expliquer ce changement de nom, qu’Amélius était d’Amérie : Porphyre vient de dire qu’Amélius était d’Étrurie, et Amérie est une ville de l’Ombrie. Fabricius, dans une note sur ce passage, propose une autre explication assez plausible : « Amelius refugit nomen ἀπὸ τῆς ἀμελείας sive negligentia ductum, et ἀπὸ τῆς ἀμερίας sive integritate appellari maluit. » Ἀμερίας désignerait dans ce cas l’indivisibilité qui est propre à la nature divine, parce que la division affaiblit toute puissance. Voy. sur ce point Proclus, Inst. Théol., p. 130.
  2. Scythopolis, ville de Judée, appelée auparavant Bethsana.
  3. Μίϰϰαλος, diminutif dérivé de μιϰρός.