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CXXI
PREMIÈRE ENNÉADE, LIVRE IX.


LIVRE NEUVIÈME.
DU SUICIDE[1].

Il ne faut pas séparer violemment l’âme du corps, mais attendre que les liens qui les unissent se rompent naturellement. Si par un acte illicite, on arrache l’âme du corps, elle conservera quelque chose du principe passif auquel elle était unie, et elle sera obligée de passer dans un nouveau corps.

D’ailleurs si le rang qu’on doit occuper là-haut dépend de l’état dans lequel on se trouve en quittant la terre, il ne faut pas sortir de la vie quand on peut encore faire des progrès[2].


  1. Pour les Remarques générales et les Éclaircissements sur ce livre, Voy. les Notes, p. 439-443, auxquelles il faut ajouter la citation de Creuzer qui se trouve ci-dessus, p. xxxvi, note 3. Voy. aussi les Principes de la théorie des intelligibles de Porphyre, § ii, iii, p. lvii.
  2. Aux rapprochements que nous avons indiqués sur ce sujet dans les Notes (p. 439-443) il faut joindre un passage remarquable de Josèphe (Guerre des Juifs, VIII, 5). Dans le discours qu’il adresse à ses soldats pour les exhorter à se rendre aux Romains, il flétrit le suicide en ces termes : « Nos corps sont mortels ; la matière dont ils se composent est périssable. Notre âme, au contraire, est créée pour l’immortalité ; portion de la Divinité, elle n’habite le corps que comme une maison de passage. Comment l’homme pourrait-il de son autorité privée chasser de son corps le principe qu’y a déposé la Divinité ? Une récompense éternelle attend ceux qui se séparent du corps conformément à la loi de la nature, purs et persévérants dans l’obéissance. L’espace le plus sacré du ciel est leur partage, et, après la révolution des siècles, ils habitent de nouveau des corps sacrés. Mais les âmes de ceux qui se portent à des excès contre eux-mêmes vont dans la plus sombre partie de l’enfer, et Dieu punit leurs crimes jusque sur leurs enfants. » Voy. G. Brecher, L’Immortalité de l’âme chez les Juifs, trad. de M. Isidore Cahen, p. 69.