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LETTRES DE PLINE. LIV. I.

façon, au moment même où je songeais à vous en adresser un. C’est donner de l’éperon à qui ne demande qu’à courir ; et je n’ai plus à craindre, ni les excuses de votre paresse, ni les scrupules de ma discrétion : j’aurais aussi mauvaise grâce de me croire importun, que vous de me traiter de fâcheux, quand je ne fais que répondre à votre impatience. Cependant n’attendez rien de nouveau d’un paresseux. Je veux vous demander de vouloir bien revoir encore le discours que j’ai prononcé dans ma ville natale, le jour que je fondai une bibliothèque. Je me souviens que vous m’avez fait déjà, sur ce morceau, quelques remarques générales : ne puis-je point obtenir qu’il passe encore une fois sous votre lime ? Je voudrais aujourd’hui que votre critique ne s’attachât pas seulement à l’ensemble ; mais qu’elle relevât les moindres détails avec ce goût sévère que nous vous connaissons. Nous serons encore libres, après cet examen, de le publier ou de le garder. Peut-être même que cette revue attentive aidera beaucoup à nous déterminer ; car, à force de revoir et de retoucher l’ouvrage, ou nous le trouverons indigne, ou nous le rendrons digne de paraître.

Toutefois, je vous l’avoue, mon incertitude vient moins de la composition que du sujet. Ne m’expose-t-il point un peu au reproche d’ostentation et de vanité ? Quelque simple que soit mon style, il sera difficile que, contraint à parler de la libéralité de mes aïeux et de la mienne, je paraisse assez modeste. Le pas est glissant, lors même que la plus juste nécessité nous y engage. Si les louanges que nous donnons aux autres ne sont déjà pas trop bien reçues, comment se promettre de faire passer celles que nous nous donnons à nous-mêmes ? La vertu, qui toute seule fait des envieux, nous en attire bien davantage quand la