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LETTRES DE PLINE. LIV. I.

votre courage, l’étendue de votre esprit. Tâchez seulement d’avoir meilleure opinion de vous ; rendez-vous justice, et les autres vous la rendront. Adieu.


IV.
Pline à Pompeia Celerina, sa belle-mère.

Quelle douce abondance dans vos maisons d’Otricoli, de Narni, d’Arsuli, de Pérouse[1] ! et quel bain commode à Narni ! Je n’ai plus besoin de vos lettres pour connaître tout cela : la lettre que je vous écrivis il y a déjà quelque temps, quoique fort courte, suffit pour faire voir que j’en suis parfaitement instruit. J’éprouve, dans ces agréables demeures, que mon bien n’est pas plus à moi que le vôtre. J’y vois pourtant une différence ; vos gens me servent mieux chez vous, que les miens ne me servent chez moi. Peut-être aurez-vous même fortune dans les maisons qui m’appartiennent, si vous me faites l’honneur d’y aller. Courez-en le risque, je vous en supplie : vous me ferez deux plaisirs à la fois ; l’un, d’user de mon bien, comme j’use du vôtre ; l’autre, de réveiller un peu l’assoupissement de mes valets, qui m’attendent toujours avec une espèce de tranquillité, qu’on pourrait appeler de la négligence. C’est le sort des maîtres trop indulgens : on s’accoutume aisément à n’en avoir pas grand’peur. Les nouveaux objets raniment le zèle des domestiques : ils aiment mieux obtenir l’approbation de leurs maîtres par le suffrage d’un étranger, que par les services qu’ils leur rendent. Adieu.

  1. Quelle douce abondance dans vos maisons, etc. De Sacy avait traduit sur un texte ainsi ponctué : Quantum copiarum in Ocriculano, in Narniensi, in Carsulano, in Perusino tuo, in Narniensi vero etiam balineum, ex epistolis meis… una illa brevis et vetus sufficit. Cette phrase est évidemment incomplète. En adoptant la ponctuation d’Ernesti, approuvée par Schæfer, je ne me suis pas dissimulé qu’il restait encore quelque difficulté : mais je crois le passage moins incorrect de cette manière qu’avec l’ancienne leçon. Ceux qui sont disposés à adopter les leçons hardies, fondées seulement sur des conjectures, peuvent recourir à la correction de Gierig : il lit : Quum me copiæ tuæ in Ocriculano… delectent, in Narniensi vero etiam balineum, ex epistolis meis intellexisti, quanquam pluribus opus non est, sed una illa brevis et vetus sufficit.