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VIE DE PLINE LE JEUNE

dignes, plus ils en étaient avides. Pline crut que ces honneurs, tant de fois profanés par la flatterie, étaient au dessous de Trajan. Persuadé que cet empereur pouvait confier le soin de sa gloire à ses actions, et que rien n’était plus propre à la rehausser, que de faire voir qu’elle pouvait se passer des titres où les autres avaient mis toute la leur, il ne lui en décerna point. Mais Trajan n’y perdit rien. La harangue où Pline les lui refuse, a duré plus que le marbre et que le bronze, où tant d’inscriptions pompeuses avaient été gravées. Elle charme encore aujourd’hui ; et en la lisant, on a peine à démêler qui l’on doit admirer le plus, ou du prince qui a pu mériter de tels éloges, ou de l’orateur qui sut les donner.

Après son consulat, il fut fait gouverneur de Bithynie. C’était une des plus grandes provinces de l’empire, et composée de deux puissans royaumes, dont l’un avait été conquis sur Pharnace, fils de Mithridate, fameux par les guerres qu’il soutint si long-temps contre les Romains ; l’autre leur avait été donné par Attale, fils de Prusias, l’un de ses rois, et qui se disait l’affranchi de la république. Pline ne prit pas moins de soin d’embellir les villes de cette province, que d’en soulager les peuples. Il fit élever un magnifique théâtre à Nicée, des aquéducs à Nicomédie, et à Sinope, colonie romaine. Il bâtit des bains publics à Pruse, et joignit, par un grand canal, le lac de Nicomédie à la mer.

Mais, pendant qu’il s’appliquait tant aux embellissemens extérieurs, il ne négligeait pas le dedans. Il liquida les dettes des villes ; il en modéra les dépenses par de sages réglemens, et mit un si bon ordre à la police, que rien ne manquait à la sûreté et à la commodité publique. Il maintint les juges dans le devoir par des exemples, et