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XXI. - Pline à Rufus.

Je m’étais rendu dans la basilique Julienne[1], pour entendre les avocats à qui je devais répondre dans l’audience suivante. Les juges avaient pris place, les décemvirs[2] étaient arrivés, les avocats étaient prêts, le silence régnait depuis long-temps[3] enfin, un envoyé du préteur se présente. On congédie les centumvirs ; l’affaire est ajournée, à ma grande satisfaction ; car je ne suis jamais si bien préparé, qu’un délai ne me fasse plaisir. La cause de cette remise est le préteur Nepos, qui fait revivre les lois du barreau. Il venait de publier un édit fort court, par lequel il avertissait et les accusateurs et les accusés, qu’il exécuterait à la lettre le décret du sénat, transcrit à la suite de son édit. Par ce décret, il était ordonné à tous ceux qui avaient un procès, de quelque nature qu’il fût[4], de prêter serment, avant de plaider, qu’ils n’avaient fait, pour le plaidoyer, ni don ni promesse, et qu’ils n’avaient exigé aucune garantie. Par ces termes, et par beaucoup d’autres, il était défendu aux avocats de vendre leur ministère, et aux parties de l’acheter. Toutefois on permettait, après le procès terminé, de donner jusqu’à la concurrence de dix milles sesterces. Le préteur, qui préside[5] aux centum-virs, embarrassé par cette action de Nepos, et voulant songer à loisir s’il devait suivre son exemple, nous a donné ce repos imprévu. Cependant l’édit de Nepos est devenu le sujet du blâme ou des éloges de toute la ville. Les uns s’écrient : Nous avons donc trouvé un réforma-

  1. La basilique Julienne, etc. C’était sans doute celle que Jules César consacra la troisième année de son empire ; on désignait par le mot de basilique un portique vaste et élevé, tel qu’on en plaçait toujours devant les théâtres, les temples et les tribunaux.
  2. Les décemvirs, etc. Les décemvirs, dont cinq étaient sénateurs, et cinq chevaliers, avaient la fonction de convoquer le conseil des centumvirs, et de les présider en l’absence du préteur. (Suet. , Aug. 36. )
  3. Les avocats étaient prêts, etc. De Sacy ne parait pas avoir bien compris tout ce passage ; il traduit : Les centumvirs étaient arrivés ; tout le monde avait les yeux tournés sur les avocats ; un profond silence régnait, lorsqu’il arriva un ordre du préteur de lever la séance. Ceci ferait croire que l’on allait commencer les
  4. De quelque nature qu’il fût. L’éditeur de la traduction de De Sacy avait donné cette leçon, qui quid negotii haberent. J’ai préféré, avec Schæfer, quidquid negotii haberent, comme plus clair et plus latin.
  5. Qui préside. Nous avons rétabli prœsidet qui avait été changé, dans le texte de la traduction, en prœsidebat.