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Je suis entré dans tout ce détail, pour vous apprendre combien cet homme seul me rend de services, et de services agréables. Ajoutez-y l’affection que j’ai pour lui depuis long-temps, et que son danger a redoublée : car nous sommes faits ainsi ; rien ne donne plus d’ardeur et de vivacité à notre tendresse, que la crainte de perdre ce que nous aimons. Et ce n’est pas la première fois que je crains pour sa vie. Il y a quelques années que, déclamant avec force et avec véhémence, il vint tout à coup à cracher le sang. Je l’envoyai en Egypte pour se rétablir ; et après y avoir fait un long séjour, il en est revenu depuis peu en assez bon état. Mais ayant voulu forcer sa voix plusieurs jours de suite, une petite toux le menaça d’une rechute ; et bientôt après, son crachement de sang le reprit. Pour essayer de le guérir, j’ai résolu de l’envoyer à votre terre de Frioul. Je me souviens de vous avoir souvent ouï dire que l’air y est fort sain[1], et le lait très-bon pour ces sortes de maladies. Je vous supplie donc de vouloir bien écrire à vos gens de le recevoir dans votre maison, et de lui donner tous les secours qui lui seront nécessaires. Il n’abusera pas de vos bontés : car il est si sobre et si modéré, qu’il refuse, non-seulement les douceurs que peut demander l’état d’un malade, mais les choses même que cet état semble exiger. Je lui donnerai pour son voyage ce qu’il faut à un homme qui va chez vous. Adieu.

  1. L’air y est fort sain. J’ai conservé la leçon du texte de De Sacy, ibi et aerem salubrem, quoique je trouve dans l’édition de Schæfer, tibi et aera salubrem, sans aucune note qui annonce une yariété de leçon. Le texte sur lequel De Sacy a traduit me semble plus naturel, et le changement de tibi en ibi n’est pas si hardi, qu’on ne puisse se le permettre, sans l’autorité des manuscrits.