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VIE DE PLINE LE JEUNE

sentiment de la femme d’Helvidius, et de deux autres femmes que des raisons d’alliance engageaient dans la même querelle. Ces femmes, chargées seules d’une si juste vengeance, au retour d’un exil, étaient trop timides pour rien entreprendre, et trop faibles pour rien exécuter.

Mais, l’amitié de Pline pour Helvidius, et son horreur pour l’infamie de Certus, y suppléa. Il ne fut point retenu par toutes les considérations qui pouvaient rendre le succès douteux. L’entreprise était périlleuse pour un jeune homme que sa réputation et sa fortune naissante engageaient à ne se point faire d’ennemis. Cependant il ne voulut pas même s’appuyer de la colère commune ; il en laissa éteindre le premier feu, et crut que le sacrifice qu’il voulait faire à la mémoire de son ami, lui serait beaucoup plus glorieux, s’il n’était fait qu’à lui, et par les mains de la seule justice, au milieu du sénat tranquille.

Ce dessein ne fut communiqué à personne, pas même à Corellius, l’un des hommes les plus sages de son siècle, et sans l’avis de qui Pline n’entreprenait rien d’important. Les seules personnes intéressées furent de la confidence.

Il en arriva ce que Pline avait prévu. Dès qu’il eut demandé au sénat la permission d’accuser Certus, qu’il ne fit que désigner, il souleva tout le monde. Les partisans de Certus s’écrièrent, et voulurent que la proposition fût rejetée. Les amis de Pline furent effrayés du péril où il s’exposait, Le consul lui-même parut contraire, et remit à l’entendre, quand son tour d’opiner sur d’autres affaires serait venu. Pendant que les autres, qui devaient parler avant lui, disaient leur avis, il n’y