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LETTRES DE PLINE. LIV. III.

cercle de nos affaires domestiques. Il est vrai que tout l’empire se conduit à présent par la volonté d’un seul homme, qui prend sur lui tous les soins, tous les travaux dont il soulage les autres. Cependant, par une combinaison heureuse, de cette source toute puissante, il découle jusqu’à nous quelques ruisseaux, où nous pouvons puiser nous mêmes[1], et où nos lettres doivent aider nos amis à puiser à leur tour.


XXI.
Pline à Priscus.

J’apprends que Martial est mort, et j’en ai beaucoup de chagrin. C’était un homme d’un esprit agréable, délié, vif, dont le style était plein de sel et de mordant, sans qu’il en coûtât rien à la candeur de son caractère[2]. À son départ de Rome, je lui fournis les frais de son voyage. Je ne devais pas moins à son amitié, aux vers qu’il a faits pour moi. L’ancien usage était d’accorder des récompenses utiles, ou honorables, à ceux qui avaient écrit à la gloire des villes, ou de quelques particuliers. Aujourd’hui, la mode en est passée, avec tant d’autres qui n’avaient guère moins de grandeur et de noblesse. Depuis que nous cessons de faire des actions louables, nous méprisons la louange. Vous êtes curieux de savoir quels étaient donc les vers que je crus dignes de ma reconnaissance. Je vous renverrais au livre même, si je ne me souvenais de quelques-uns. S’ils vous plaisent, vous chercherez les autres

  1. Où nous pouvons, etc. De Sacy traduisait : Non-seulement nous pouvons puiser dans ces ruisseaux, mais en faire passer quelque partie à nos amis par nos lettres. Ceci est d’une hardiesse un peu trop bizarre.
  2. Plein de sel et de mordant, etc. Le mot d’amertume, choisi par le traducteur, ne convenait pas à l’idée de Pline.