Page:Pline le Jeune Lettres I Panckoucke 1826.djvu/287

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
227
LETTRES DE PLINE. LIV. III.

qui se faisait un plaisir de favoriser et d’animer les poètes. Vous me faites tort : il ne faut ni me prier, ni me presser ; je suis adorateur de la poésie, et j’ai pour vous une tendresse que rien n’égale. Ne doutez donc pas que je ne fasse, avec autant d’exactitude que de joie, ce que vous désirez. Je pourrais déjà vous mander, que votre ouvrage est fort bon, et qu’il mérite de paraître ; du moins, autant que j’en puis juger par les endroits que vous avez lus devant moi, et si votre manière de lire ne m’en a point imposé ; car votre débit est plein d’art et de charme. Mais j’ai assez bonne opinion de moi-même, pour croire que le prestige du débit ne va point jusqu’à m’ôter le jugement : il peut bien le surprendre, mais non pas le corrompre, ni l’altérer. Ainsi, j’ai déjà le droit de prononcer sur l’ensemble de l’ouvrage : la lecture m’apprendra ce que je dois penser de chaque partie. Adieu.


XVI.
Pline à Nepos.

J’avais déjà remarqué, que, parmi les actions et les paroles des hommes et des femmes illustres, les plus belles ne sont pas toujours les plus célèbres[1]. L’entretien que j’eus hier avec Fannia, m’a confirmé dans cette opinion. C’est la petite-fille de cette célèbre Arria, qui, par son exemple, apprit à son mari à mourir sans regret. Fannia me contait plusieurs autres traits d’Arria, non moins héroïques, quoique moins connus. Vous aurez, je m’imagine, autant de plaisir à les lire, que j’en ai eu à les entendre.

  1. Les plus belles ne sont pas toujours les plus célèbres. Le reste de la lettre prouve que tel est le sens de la première phrase : il n’est que vaguement indiqué dans la version de De Sacy : Quelques-unes ont plus d’éclat, d’autres plus de grandeur.