Page:Pline le Jeune Lettres I Panckoucke 1826.djvu/281

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
221
LETTRES DE PLINE. LIV. II.
XIII.
Pline à Romanus.

Je vous ai envoyé, comme vous le désiriez, le discours de remerciement que j’ai adressé à l’empereur en commençant mon consulat[1] : vous l’auriez reçu, quand même vous ne me l’eussiez pas demandé. Ne considérez pas moins, je vous prie, la difficulté, que la beauté du sujet. Dans tous les autres, la nouveauté seule suffit pour soutenir l’attention du lecteur : ici, tout est connu, tout a été dit et répété : en sorte que le lecteur n’ayant plus à s’occuper des choses, et tranquille sur ce point, s’attache entièrement au style, et le style résiste difficilement à une critique dont il est le seul objet. Et plût aux dieux que l’on s’arrêtât du moins au plan, aux liaisons, aux figures du discours ! Car enfin, les plus grossiers peuvent quelquefois inventer heureusement, et s’exprimer en termes pompeux ; mais ordonner avec art, distribuer les figures avec une agréable variété, c’est ce qui n’appartient qu’à la science. Il ne faut pas même rechercher toujours l’élévation et l’éclat. Dans un tableau, rien ne fait tant valoir la lumière, que le mélange des ombres : il en est de même d’un discours ; il faut savoir tour à tour en élever, en abaisser le ton. Mais j’oublie que je parle à un maître : tout ce que je dois lui dire, c’est de vouloir bien me marquer les passages à corriger. Je croirai mieux que vous approuvez le reste, si je vois que vous n’épargnez pas les endroits faibles. Adieu.

  1. Le discours de remerciement, etc. C’est le Panégyrique de Trajan. Voyez la lettre 18e du même livre.