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LETTRES DE PLINE. LIV. II.

tirer des présages de l’observation des astres, mais pour se livrer au travail : il se mettait à l’étude, dès que la nuit était tout à fait venue ; en hiver, à la septième heure, au plus tard à la huitième, souvent à la sixième. Il n’était pas possible de moins donner au sommeil, qui quelquefois le prenait et le quittait sur les livres[1].

Avant le jour, il se rendait chez l’empereur Vespasien, qui faisait aussi un bon usage des nuits. De là, il allait s’acquitter des fonctions qui lui étaient confiées. Ses affaires faites, il retournait chez lui ; et ce qui lui restait de temps, c’était encore pour l’étude. Après le repas[2] (toujours très-simple et très-léger, suivant la coutume de nos pères), s’il se trouvait quelques momens de loisir, en été, il se couchait au soleil : on lui lisait quelque livre : il prenait des notes, et faisait des extraits ; car jamais il n’a rien lu sans extraire, et il disait souvent, qu’il n’y a si mauvais livre, où l’on ne puisse apprendre quelque chose.

Après s’être retiré du soleil, il se mettait le plus souvent, dans le bain d’eau froide. Il mangeait légèrement, et dormait quelques instans. Ensuite, et comme si un nouveau jour eût commencé, il reprenait l’étude jusqu’au moment du souper. Pendant qu’il soupait, nouvelle lecture, nouveaux extraits, mais en courant. Je me souviens qu’un jour, un de ses amis interrompit le lecteur, qui avait mal prononcé quelques mots, et le fit répéter. Mais vous l’aviez compris, lui-dit mon oncle ? — Sans doute, répondit son ami. — Et pourquoi donc, reprit-il, le faire recommencer ? Votre interruption nous coûte plus de dix lignes. Voyez si ce n’était pas être bon ménager du temps. L’été, il sortait de table avant la nuit ; en hiver, entre la première et la seconde heure :

  1. Le prenait et le quittait sur les livres. J’ai laissé la leçon etiam inter studia, quoique j’aie trouvé dans l’édition de Schæfer, donnée par M. Lemaire, etiam studia.
  2. Après le repas. Vers le milieu du jour, les Romains prenaient un repas, appelé prandium : il se composait de mets légers, peu nourrissans, et sans apprêt. Il y a si peu de rapport entre ce repas et celui que nous appelons dîner, que je n’ai pas cru pouvoir laisser ce dernier mot dans la traduction de De Sacy.