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DE DE SACY

pour un très-petit nombre de génies supérieurs qui, sortant tout formés des mains de la nature, n’ont besoin ni de maître ni de modèle : le travail de la traduction serait pour tous les autres une riche moisson de principes et d’idées, et une excellente école dans l’art d’écrire ; c’était l’avis de Despréaux. Que n’est-il plus suivi par nos jeunes littérateurs, dont la plupart se hâtent de prendre la plume sans avoir appris à la tenir, et d’être auteurs avant de penser ! On peut les comparer à ces enfans qui, se mariant avant d’être hommes, veulent donner la vie à d’autres, quand l’âge n’a pas achevé de les former eux-mêmes, et sont punis, par des productions avortées, de la violence qu’ils font à la nature. Mais le rang peu flatteur qu’occupent dans les lettres ceux qui se dévouent à l’ingrat et pénible métier de traducteur, rebute la vanité ardente d’un écrivain novice qui, pressé de se faire un nom, ignore que, dans la littérature comme dans le commerce, une fortune sûre et bornée, paisiblement acquise en faisant valoir le bien des autres, est préférable à une indigence orgueilleuse, qui joint la prétention de la dépense à l’extérieur de la misère.

M. De Sacy débuta par la traduction des Lettres de Pline le Jeune… Aussi agréable à lire que l’original, elle est en même temps moins fatigante, parce que le traducteur, en rendant toute la finesse de Pline, la rend avec plus de simplicité que lui : l’esprit de l’auteur s’y montre avec d’autant plus d’avantage, qu’il y est dégagé de l’apprêt qui le dépare trop souvent dans Pline même ; et le modèle, sans cesser d’être ressemblant, est peint