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une Diane de leur façon ; et à Chios même on a parlé d’une Diane faite par eux, qui est placée très-haut, et dont le visage paraît sévère quand on entre et gai quand on sort. Il y a de leurs ouvrages à Rome sur le faîte du temple d’Apollon Palatin, et dans presque tous les monuments élevés par le dieu Auguste. Il y en eut aussi de leur père à Délos et à Lesbos. Les œuvres de Dipœnus remplissaient Ambracie, Argos, Cléones. 4 Tous ces artistes n’ont employé que le marbre blanc de Paros, nommé d’abord lychnites, parce que, dit Varron, on le taillait dans les carrières à la lumière des lampes. Depuis on en a découvert beaucoup d’autres plus blancs, et récemment encore dans les carrières de Lune. On rapporte de celui du Paros un fait merveilleux : dans un bloc qu’on fendit avec des coins, apparut une figure de Silène.

5 N’oublions pas de remarquer que la sculpture est de beaucoup antérieure (XXXV, 44) à la peinture et à la statuaire en airain ; que l’une et l’autre ont commencé à Phidias, dans la quatre-vingt-deuxième olympiade, c’est-à-dire environ trois cent trente-deux ans après. On dit que Phidias lui-même a travaillé le marbre, et qu’il y a de lui à Rome, dans les édifices d’Octavie XXXV, 37 et 40), une Vénus d’une merveilleuse beauté. Ce qui est certain, c’est qu’il fut le maître d’Alcamène (XXXIV, 19), Athénien, sculpteur des plus renommés. Il y a de ce dernier à Athènes beaucoup d’ouvrages dans les temples, et hors des murs une célèbre Vénus dite Vénus des Jardins : on dit que Phidias lui-même y mit la dernière main. 6 Phidias eut aussi pour élève Agoracrite de Paros, qu’il aima10 à cause de sa jeunesse : c’est pourquoi on prétend qu’il mit plusieurs de ses propres ouvrages sous le nom de son élève. Les deux élèves concoururent ensemble pour une Vénus ; et Alcamène l’emporta, non par la supériorité de son œuvre, mais par le suffrage de la ville, qui prit parti pour le concitoyen contre un étranger. Aussi dit-on qu’Agoracrite vendit sa figure sous condition qu’elle ne serait pas à Athènes, et qu’il la nomma Némésis ; elle fut placée à Rhamnonte (IV, 11), canton de l’Attique, et M. Varron a donné la préférence à cette statue sur toutes les autres. On voit encore dans la même ville11, au temple de la Grande Mère, un ouvrage d’Agoracrite.

7 Chez tous les peuples auxquels est arrivée la renommée du Jupiter Olympien, Phidias (XXXIV, 19) est sans contestation un très-illustre artiste. Mais, pour que ceux-là même qui n’ont pas vu ses ouvrages sachent qu’à raison il est loué, nous citerons de petites particularités qui montrent seulement combien il était ingénieux. Nous n’invoquerons pour cela ni la beauté du Jupiter Olympien, ni la grandeur de sa Minerve d’Athènes, qui a vingt-six coudées et qui est d’ivoire et d’or ; mais sur la face convexe du bouclier12 de la déesse il a gravé le combat des Amazones ; sur la partie concave de ce même bouclier, la bataille des dieux et des géants ; sur les semelles13, celle des Lapithes et des Centaures : tant avec lui l’art se logeait dans les plus petits espaces. 8 Il a nommé naissance de Pandore ce qu’il a gravé sur la base14. Là sont vingt dieux naissants ; la Victoire surtout est admirable. Les connaisseurs admirent aussi le serpent, et, sous la lance même, le sphinx d’airain. Cela soit dit15 en passant d’un artiste qui n’est jamais assez loué ; cela soit dit aussi pour faire connaître que