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HISTOIRE NATURELLE
DE PLINE.
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LIVRE XX.

I.

1 Ici nous entrons dans l’œuvre la plus grande de la nature : nous allons parler à l’homme de ses aliments, et le forcer d’avouer qu’il ignore ce par quoi il vit. Qu’on n’aille pas, trompé par la trivialité des dénominations, regarder ce sujet comme petit et mesquin. J’expliquerai la paix et la guerre naturelle, les haines et les amitiés de choses sourdes et insensibles, faites toutes pour l’homme ; merveilleux concours que les Grecs ont nommé sympathie, et où l’on voit, l’eau et le feu étant les principes de toute chose, l’eau éteindre le feu, le soleil la dévorer, la lune la produire, et ces deux astres s’éclipser l’un par l’autre ; 2où l’on voit, pour descendre de ces hauteurs, l’aimant attirer à soi le fer, une autre pierre le repousser (XXXVI, 25) ; le diamant, la joie de l’opulence, réfractaire et invincible à toutes les violences, se briser par l’action du sang de bouc ; et tant d’autres merveilles dont nous parlerons en lieu et place, égales ou plus grandes. Seulement, qu’on nous pardonne de commencer par les objets les plus petits, mais salutaires, et d’abord par les plantes de jardin.

II.

1(I.) Nous avons dit (XIX, 24) qu’il est un concombre sauvage (momordica elaterium, L.), beaucoup moins gros que le concombre cultivé. On en prépare un médicament dit élatérion ; c’est le suc exprimé du fruit. Ce suc en jaillit, même avec danger pour les yeux, si pour le recueillir on n’incise pas le fruit avant la maturité. Cueilli, on garde le fruit une nuit ; le lendemain, on l’incise avec un roseau. Quelquefois on le saupoudre de cendre, pour retenir une plus grande quantité de suc. Ce suc, exprimé, est reçu dans de l’eau de pluie, et va au fond. Épaissi au soleil, on en fait des pastilles, grandement utiles aux mortels. 2Il guérit l’obscurcissement de la vue, les maux d’yeux et les ulcérations des paupières. Ou dit que si on touche les racines de la vigne avec ce suc, les oiseaux n’attaquent pas le raisin. Avec la racine cuite dans du vinaigre on fait des applications contre la goutte, et le suc est un remède pour le mal de dents. Séchée et mêlée à la résine, elle guérit l’impétigo, la gale, les maladies appelées psore et lichen, les parotides et les tumeurs ; elle colore les cicatrices. Le suc des feuilles avec du vinaigre s’instille dans les oreilles en cas de surdité.

III.

1Le moment de faire l’élatérion est l’au-