les modèles se vendaient d’ordinaire plus cher aux artistes eux-mêmes que les ouvrages des autres.
3 Il ajoute que ce modeleur exécuta une Vénus Génitrix qui est dans le forum de César, mise en place avant d’être achevée, tant on avait hâte de la dédier ; que154 ce même artiste convint avec Lucullus de faire, pour 60,000 sesterces (12,600 fr.), une figure de la Félicité, figure dont on fut privé par la mort de l’un et de l’autre ; qu’Octave, chevalier romain, voulant faire faire une coupe, Arcésilaüs lui en vendit le modèle en plâtre un talent (4,920 fr.). Varron loue encore Pasitélès, qui disait la plastique mère de la ciselure, de la statuaire et de la sculpture, et qui, bien qu’excellent dans tous ces arts, n’exécuta jamais rien qu’il n’eût d’abord modelé. En outre, il dit que l’art de modeler fut cultivé en Italie et surtout en Étrurie, et que de Frégelles fut appelé Turianus155, avec qui Tarquin l’Ancien fit marché pour la figure de Jupiter, qui devait être consacrée dans le Capitole ;
4 que ce Jupiter était d’argile, et que pour cette raison on était dans l’habitude de le peindre en minium (XXXIII, 36) ; que le quadrige placé sur le faîte de ce temple, et dont nous avons souvent parlé, était d’argile ; que le même artiste a exécuté l’Hercule qui porte encore aujourd’hui à Rome le nom de la matière dont il est fait. Telles étaient dans ce temps les plus belles statues des dieux ; et Rome n’a pas à se plaindre de ceux qui ont adoré des divinités d’argile : l’or et l’argent, ils ne le travaillaient pas même pour les dieux.
XLVI
1 Il reste156 en plusieurs lieux de tels simulacres. À Rome et dans les municipes on voit encore de nombreux faîtes de temple d’un travail admirable, et, en raison de l’art et de la longue durée, plus respectables que l’or, ou du moins plus purs. Aujourd’hui même, au milieu de nos richesses, dans les sacrifices on offre les premières libations, non dans des vases murrhins ou de cristal, mais dans des simpules157 (petites coupes). Oui, le bienfaisance de la terre paraîtra inexprimable à quiconque en appréciera tous les détails. Sans même parler des céréales, du vin, des fruits, des herbes, des arbustes, des médicaments, des métaux, présents qu’elle nous prodigue et dont nous avons déjà traité, la poterie seule, à cause du perpétuel emploi qu’on en fait, satisferait nos exigences : tonneaux pour contenir les vins, tuyaux pour conduire les eaux, boules creuses faites en mamelon pour les bains, briques simples et briques doubles pour soutenir les toits ; usages en raison desquels le roi Numa établit un septième collège pour les ouvriers en terre. 2 Quelques-uns même ont mieux aimé être enterrés en des cercueils de terre cuite, par exemple M. Varron, à la pythagoricienne, avec des feuilles de myrte, d’olivier et de peuplier noir. La majeure partie du genre humain se sert de vases de terre. On cite la poterie de Samos comme excellente pour la vaisselle de la table. 3 La même vogue appartient à Arretium en en Italie, et, pour les gobelets seulement, à Surrentum, à Asta, à Pollentia, à Sagonte en Espagne, à Pergame en Asie. La ville de Tralles en Asie158, et en Italie celle de Modène, donnent aussi leur nom à leurs poteries en terre ; car ce genre de produits rend célèbres des localités, et les fabriques à roue qui ont du renom expédient leurs ouvrages de tous côtés, par terre et par mer. À Érythres, dans un temple, on montre aujourd’hui encore deux amphores consacrées, à cause du peu d’épaisseur de leurs parois. Elles sont dues au défi entre un maître et son élève, à