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Nous n’avons, il est vrai, à parler que des campagnes et des travaux rustiques ; mais chez les anciens c’était l’occupation principale et la plus honorée.

II. (II.) 1. Romulus établit tout d’abord les prêtées des champs. Ce furent les onze fils d’Acca Laurentia, sa nourrice, et Romulus lui-même, sous le nom de douzième frère. Il leur donna, comme l’insigne le plus auguste de leur sacerdoce, une couronne d’épis attachée avec une bandelette blanche, et ce fut la première couronne chez les Romains. Cette dignité est à vie, et elle accompagne même les exilés et les captifs. Alors deux jugères (50 ares) suffisaient au peuple romain ; et Romulus n’attribua à personne une plus grande portion. Aujourd’hui des hommes naguère esclaves de Néron, dédaignant des vergers de cette étendue, veulent avoir des viviers plus grands ; et il faut leur savoir gré s’ils n’ont pas des cuisines plus spacieuses.

2. Numa établit l’usage d’honorer les dieux avec des grains, de les supplier en leur offrant une pâte salée, et, d’après Hémina, de rôtir le blé, attendu que, rôti, il donne une nourriture plus saine. Il n’eut qu’un moyen d’obtenir ce dernier point : ce fut en statuant que le blé n’était pas une offrande pure, à moins de passer par le feu. Il établit aussi les Fornacales, fêtes de la torréfaction du blé, et la fête des dieux Termes, non moins religieusement observée : c’étaient, en effet, les dieux que l’on connaissait surtout dans ces temps. On avait la déesse Séia, ainsi nommée de semer ; la déesse Segesta, ainsi nommée des moissons (segetes) : nous voyons leurs statues dans le Cirque. La religion défend de prononcer le nom de la déesse Segesta sous un toit. On ne touchait même rias aux récoltes de grain ou de vin avant que les prêtres en eussent offert les prémices.

III. 1. On appelait joug ce qui pouvait être labouré en un seul jour par une paire de bœufs ; actus, l’étendue que deux bœufs pouvaient labourer tout d’une haleine : il était de cent vingt pieds ; doublé en longueur, il faisait le jugère. La récompense la plus considérable, pour les généraux et pour les citoyens courageux, était l’étendue de terre qu’ils pouvaient circonscrire par un sillon en un seul jour. Il arrivait encore que le peuple, chacun se cotisant, leur donnait un quart de cange (0 lit., 81) ou une hémine ( 0 lit., 27) de blé. Les premiers surnoms furent même tirés de l’agriculture. Pilumnus fut ainsi nommé pour avoir inventé le pilon à broyer le blé ; Pison vient de pisere, piler ;

2. les Fabius, les Lentulus, les Cicéron, ont eu ces noms d’après l’espèce de légume qu’ils excellaient à cultiver. Dans la famille des Junius on nomma Bubulcus un homme qui savait très bien conduire les bœufs. Dans les cérémonies religieuses, rien de plus sacré que le mariage par confarréation ; et les nouvelles mariées portaient devant elles un gâteau de far (blé). Mal cultiver son champ était une négligence notée par les censeurs ; et, comme le dit Caton (De re rust., preaf.), on croyait très amplement louer celui qu’on disait bon cultivateur. De là vient le mot de locuples, riche ; plenus loci, plein de terre ; le nom de l’argent même, pecunia (XXXIII, 13), dérive de pecus, bétail.

3. Aujourd’hui encore, dans les registres des censeurs, on comprend sous le nom de pâturages tous les revenus publics, parce que les pâturages furent longtemps le seul revenu de l’État. Les amendes non plus ne s’imposaient qu’en moutons ou en bœufs ;