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nous l’appelons mâle, bien qu’ordinairement on ne se serve pas de la dénomination de mâle là où il n’y a pas de femelle. On a voulu, par principe religieux, bannir une dénomination empruntée à l’autre sexe. Quelques-uns pensent qu’il est appelé mâle parce qu’il a l’apparence de testicules. On estime le plus mamelonné, forme qu’il prend quand une larme venant à s’arrêter est suivie d’une autre qui s’y mêle. Je lis dans les auteurs que chaque motte d’encens remplissait la main, quand, ayant moins d’avidité, on se pressait moins de récolter. Les Grecs donnent à ces mottes le nom de stagonies (gouttes) et d’atomes, et d’orobies (en forme d’ers) à celles d’un moindre volume.

[4] Nous appelons manne les miettes détachées par le frottement. Cependant, encore aujourd’hui, on trouve des mottes qui pèsent le tiers d’une mine, c’est-à-dire, 28 deniers (101 gr. 996). Alexandre le Grand, dans son enfance, chargeant d’encens les autels avec prodigalité, son précepteur Léonides lui avait dit d’attendre, pour implorer les dieux de cette manière, qu’il eût subjugué les pays produisant l’encens : ce prince, s’étant emparé de l’Arabie, lui envoya’un navire chargé d’encens, et l’exhorta à implorer les dieux sans parcimonie.

[5] L’encens récolté est apporté a dos de chameau à Sabota (VI, 32, 12), où une seule porte est ouverte pour cet usage. S’écarter de la route est un crime puni de mort par les lois. Là les prêtres prélèvent, à la mesure, non au poids, la dîme en l’honneur du dieu, qu’ils nomment Subis ; il n’est pas permis d’en vendre auparavant ; c’est avec cette dîme qu’on fait face aux dépenses publiques, car le dieu défraye généreusement les voyageurs pendant un certain nombre de journées de marche. L’encens ne peut être exporté que par le pays des Gébanites (VI, 32, 11) ; aussi paye-t-il un droit à leur roi. Thomma, leur capitale, est éloignée de Gaza, ville de Judée, située sur notre mer (Méditerranée), de 4, 436, 000 pas, trajet divisé en 65 stations de chameaux. Il y a encore des portions fixes à donner aux prêtres et aux scribes des rois ; en outre, les gardiens, les soldats, les portiers, les employés, se font leur part. Partout où l’on passe il faut payer, ici pour l’eau, là pour le fourrage, pour les stations, pour les divers péages, de sorte que la dépense pour chaque chameau jusqu’à la côte de notre mer monte à 688 deniers (564 fr. 16) ; là il faut encore payer aux fermiers de notre empire. Aussi la livre du meilleur encens est de 5 deniers (4 fr. 92) ; la seconde qualité, 5 deniers (4 fr. 10) ; la troisième qualité, 3 deniers (2 f. 46). Chez nous on le falsifie avec des larmes de résine blanche, qui ressemblent beaucoup à l’encens ; mais on découvre cette sophistication par les moyens indiqués (XI, 19). On le reconnaît à la blancheur, à la grosseur, à la fragilité, à ce que, mis sur un charbon, il brûle aussitôt, et encore à ce que, loin de se laisser mâcher, il s’émiette.

XXXIII. (XV.) [1] La myrrhe est le produit d’un arbre qui croît dans, les mêmes forêts que l’arbre d’encens suivant quelques-uns, à part suivant le plus grand nombre : le fait est qu’elle vient dans plusieurs endroits de l’Arabie, comme on le verra quand nous parlerons des espèces. Une myrrhe estimée est apportée des îles (VI, 32), et les Sabéens même traversent la mer pour en aller chercher dans le pays des Troglodytes. La myrrhe vient aussi par culture, et alors on la préfère de beaucoup ; elle aime le hoyau et le déchaussement, meilleure quand la racine est rafraîchie (amyris kafal, Forsk.).