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XXXI. [1] On n'est pas même d'accord sur la forme de l'arbre. Nous avons fait des expéditions dans l'Arabie, les armes romaines ont -pénétré dans une grande partie de ce pays, et même Caïus César (VI, 31 et 32), fils d'Auguste, lui a demandé du renom : cependant aucun Latin, que je sache, n'a décrit l'apparence de cet arbre. Quant aux Grecs, leurs descriptions varient : les uns ont dit qu'il a la feuille du poirier, plus petite seulement et d'une couleur herbacée; les autres, qu'il ressemble à un lentisque, dont la feuille serait un peu rousse. Quelques-uns ont dit que c'est un térébintbinier, et que le roi Antigone, à qui on en apporta un arbrisseau, en jugea ainsi.

[2] Le roi Juba (VI, 31), dans est ouvrage adressé au fils d'Auguste, Caïus César, qu'enflammait la renommée de l'Arabie, rapporte que le tronc est tordu, que les branches sont très semblables à celles de l'érable du Pont, et qu'il jette un suc comme l'amandier; qu'on le voit avec ces caractères dans la Carmanie et en Égypte, contrée où il a été planté par le zèle des Ptolémées. Il est certain qu'il e l'écorce du laurier ; quelques-uns ont dit que la feuille aussi est semblable à celle de cet arbre. Toujours est-il que tels étaient les arbres d'encens à Sardes (XVI, 59) ; car les rois d'Asie prirent aussi le soin d'en faire planter. Les ambassadeurs qui de mon temps sont venus d'Arabie ont augmenté nos incertitudes; ce qui doit nous étonner à juste titre, car on nous apporte des branches de l'arbre d'encens, d'après lesquelles on peut croire que le végétal qui les porte e un tronc uni et sans noeuds.

XXXII. [1] On avait la coutume de faire la récolte une fois par an, les occasions de vendre étant moins fréquentes. Aujourd'hui le profit amène à demander une seconde vendange. La première vendange, celle qui est naturelle, se prépare vers le lever de la Canicule, au moment des chaleurs les plus ardentes ; on pratique des incisions là où l'écorce parait le plus gorgée, là où elle est le plus mince et le plus tendue. On dilate la plaie, mais sans rien enlever. il en jaillit une écume onctueuse, qui s'épaissit et se coagule; on la reçoit sur des nattes de palmier quand la nature du lieu l'exige, autrement sur une aire battue alentour. L'encens est plus pur de la première façon, plus pesant de la seconde. On fait tomber avec un instrument de fer ce qui est resté attaché à l'arbre; aussi cette portion est-elle mélangée de fragments d'écorce. La forêt, divisée en lots déterminés, est à l'abri des déprédations, grâce à la probité mutuelle ; personne ne garde les arbres incisés, personne ne vole son voisin.

[2] Mais certes à Alexandrie , où l'on sophistique l'encens, les laboratoires ne sont jamais suffisamment gardés; on appose un cachet sur le caleçon des ouvriers; on leur met un masque sur la tète, ou un réseau à mailles serrées ; on ne les laisse sortir que nus. Tant il est vrai que chez nous les châtiments donnent moins de sûreté qu'on n'en trouve dans ces forêts ! On recueille en automne ce que l'été a produit ; c'est l'encens le plus pur, il est blanc. La seconde vendange se fait au printemps; les écorces ont été incisées en hiver; l'encens sort roux, il n'est pas comparable au premier. Le premier se nomme carphéote, le second dathiate. On croit aussi que celui d'un arbre jeune est plus blanc, et celui d'un arbre vieux plus odorant. Quelques-uns pensent qu'il en vient dans les îles, et qu'il y est meilleur ; Juba nie que les îles en produisent.

[3] L'encens qui est resté suspendu en forme de goutte arrondie,