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même espèce qui fascinent par leurs regards, et donnent la mort à ceux sur lesquels ils fixent longtemps leurs yeux, surtout leurs yeux courroucés ; les adultes ressentent plus facilement leur influence funeste. Il est remarquable qu’ils ont des pupilles à chaque œil. Apollonides dit qu’il y a en Scythie des femmes de cette espèce, qu’on appelle Bithyes. Phylarque place dans le Pont les Thibiens et beaucoup d’autres de même espèce, qu’on reconnaît, dit-il, parce qu’ils ont dans un œil une pupille double, et dans l’autre l’effigie d’un cheval, et qui de plus ne peuvent être submergés, même chargés de vêtements. Damon a parlé de gens semblables en Éthiopie, les Pharusques, dont la sueur cause la consomption à ceux qu’elle touche.

Cicéron, parmi les auteurs latins, assure aussi que toutes les femmes qui ont les pupilles doubles nuisent par leur regard : tant la nature, après avoir placé dans l’homme le goût qu’ont les bêtes féroces pour la chair humaine, s’est complu à créer même des poisons dans tout le corps et dans les yeux de certains individus, de peur qu’il n’y eût quelque part une influence funeste qui ne fût pas dans l’homme !

Non loin de Rome, dans le territoire des Falisques, sont quelques familles appelées Hirpes : dans un sacrifice annuel qui se fait en l’honneur d’Apollon au mont Soracte (II, 95), ces Hirpes passent sur un bûcher embrasé sans se brûler. Pour cette raison, un sénatus-consulte les exempte à toujours du service militaire et de toutes les autres charges.

Quelques-uns ont des parties du corps douées de propriétés merveilleuses : par exemple Pyrrhus, dont le gros orteil droit guérissait par le contact les affections de la rate. On rapporte que cet orteil ne put être brûlé avec le reste du corps, et qu’il fut renfermé dans une niche d’un temple.

Les contrées de l’Inde et de l’Éthiopie sont surtout fertiles en merveilles. Les plus grands animaux appartiennent à l’Inde. On le voit par les chiens, qui y sont de plus haute taille qu’ailleurs [VIII, 40). On cite des arbres d’une telle hauteur, qu’une flèche ne peut les dépasser ; la fécondité du sol, la température du ciel, l’abondance des eaux, font que sous un seul figuier peut s’abriter (le croira qui voudra) un escadron de cavalerie (XII, 11) ; et les joncs y sont d’une telle grandeur, que chaque entre-nœud fournit un canot qui parfois porta trois hommes (XVI, 85).

Là beaucoup d’hommes (cela est certain) ont plus de cinq coudées, ne crachent jamais, n’éprouvent jamais de douleur de tête, de dents ou d’yeux, et rarement des douleurs dans d’autres parties ; tant est bien mesurée pour les endurer la chaleur du soleil ! Leurs philosophes, qu’on appelle gymnosophistes, gardent depuis le matin jusqu’au soir les yeux fixés sur le soleil, et se tiennent sur un seul pied pendant toute la journée dans des sables brûlants. Mégasthène rapporte que, dans une montagne nommée Nule les hommes ont les pieds tournés à rebours, et huit doigts à chaque pied.

Ctésias a écrit que dans beaucoup de montagnes une race d’hommes à têtes de chien s’habille avec des peaux de bête, aboie au lieu de parler, et, armée de griffes, se nourrit du produit de sa chasse sur les quadrupèdes et les oiseaux : il ajoute qu’il y en avait plus de 120.000 au