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séparée par le Jourdain du reste de la Judée. La Judée même est divisée en dix toparchies, dans l'ordre suivant : celle de Jéricho, plantée de palmiers, arrosée de sources; celle d'Emmaüm, celle de Lydda, celle de Joppé, celle d'Acrabatène, celle de Gophna, celle de Thamna, celle de Bethleptephe, telle d'Orine, ou fut Jérusalem, la plus célèbre des villes non de la Judée seulement, mais de l'Orient; celle d'Herodium, avec une ville illustre du même nom.

[2] (XV.) Le Jourdain sort de la source Paneas qui a donné un surnom à une Césarée dont nous parlerons (V, 16). C'est un fleuve agréable, et, autant que la situation des lieux le permet, se repliant et se montrant aux habitants de ses bords, comme s'il ne se rendait qu'à regret au lac Asphaltite, lac affreux où il finit par s'absorber et perdre ses eaux renommées, en les mélangeant à de eaux pestilentielles. Aussi, dès que les vallées qu'il traverse lui en offrent l'occasion, il s'épanche en un lac que beaucoup appellent lac de Génésara, long de 16.000 pas et large de 6.000, entouré de villes agréables, au levant Julias et Hippo, au midi Tarichée, dont quelques-uns donnent le nom au lac; à l'occident Tibériade, qui a des sources thermales et salutaires.

[3] (XVI.) Le lac Asphaltite ne produit que du bitume; d'où le nom qu'il porte. Aucun corps d'animal ne s'y enfonce: les taureaux et les chameaux y surnagent (17). De là le bruit, que rien n'y va au fond. Il a de long plus de 100.000 pas, dans la plus grande largeur 25.000, dans sa moindre 6.000. Il est dominé à l'orient par l'Arabie des Nomades, au midi par Machaeronte, autrefois la plus forte place de la Judée après Jérusalem; de ce même côté est une source chaude employée à des usages médicaux, Callirrhoé, nom qui, par lui-même, indique le mérite de ses eaux.

[4] (XVII. ) A l'occident, mais à une distance du rivage où il n'y a rien à craindre des exhalaisons, sont les Esséniens, nation solitaire, singulière par-dessus toutes les autres, sans femme, sans amour, sans argent, vivant dans la société des palmiers. Elle se reproduit de jour en jour, grâce à l'affluence de nouveaux hôtes; et la foule ne manque pas de ceux qui, fatigués de la vie, sont amenés par le flot de la fortune à adopter ce genre de vie. Ainsi, pendant des milliers de siècles, chose incroyable, dans une nation chez laquelle il ne naît personne, tant est fécond pour elle le repentir qu'ont les autres de leur vie passée. Au-dessous d'eux fut la ville d'Engadda, ne le cédant qu'a Jérusalem pour la fertilité et ses bois de palmiers; maintenant c'est un monceau de cendres comme Jérusalem. De là on arrive à Masada, château sur un rocher, qui n'est pas loin, non plus, du lac Asphaltite. Voilà pour la Judée.

XVI. (XVIII) [1] Près de la Judée, du côté de la Syrie, est la Décapole, ainsi nommée du nombre de se villes, sur lequel tous les auteurs ne sont pas d'accord. La plupart comptent Damas, fertilisée par les dérivations du fleuve Chrysorrhoas, qui s'y absorbe; Philadelphie, Raphana, toutes villes qui s'avancent vers l'Arabie; Scythopolis, ainsi appelée des Scythes qui y furent établis, et portant auparavant le nom de Nysa à cause de Bacchus, dont la nourrice y fut ensevelie; Gadara, au pied de laquelle coule le Hieromiax ;