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PLINE.


toute la partie est de la mer des Indes, tournée vers la mer Caspienne (42) (VI, 15), a été parcourue par les armes macédoniennes, sous les règnes de Séleucus et d’Antiochus, qui voulurent que ces mers fussent appelées de leur nom Séleucide et Antiochide. Encore, vers la mer Caspienne, beaucoup de rivages de l’Océan ont été explorés, et peu s’en faut que tout le septentrion, d’un côté ou de l’autre, n’ait été sillonné par la rame. Si de pareilles navigations pouvaient laisser place à des doutes, le Palus-Méotide les lèverait ; car, ou c’est un golfe de l’Océan, comme je vois que plusieurs l’ont cru, ou une flaque qui n’en est séparée que par un espace étroit. Dans une autre direction, en partant de Cadix et en marchant vers l’occident, on parcourt aujourd’hui, le long de la Mauritanie, une grande partie de la mer du midi. 3La plus grande partie de cette mer et en même temps de tout l’Orient a été visitée, grâce aux victoires d’Alexandre, jusqu’au golfe d’Arabie ; et sur ce golfe, lors de l’expédition qu’y fit C. César, fils d’Auguste (VI, 31), des débris de naufrage furent, assure-t-on, reconnus comme appartenant à des vaisseaux espagnols. Hannon, pendant que la puissance de Carthage florissait, navigua depuis Cadix jusqu’aux limites de l’Arabie, et mit par écrit l’histoire de sa navigation. Dans le même temps, Himilcon fut envoyé pour explorer les parties extérieures de l’Europe. 4En outre, Cornélius Népos raconte que de son temps un certain Eudoxe, fuyant le roi Ptolémée Lathyre (117-81 av. J.-C.), sortit du golfe Arabique et arriva jusqu’à Cadix. Longtemps avant lui, Cælius Antipater atteste avoir vu un marin qui, dans des vues commerciales, avait fait par mer le trajet d’Espagne en Éthiopie. Le même Cornélius Népos, au sujet du circuit septentrional, dit que Quintus Métellus Céler, collègue de Lucius Afranius dans le consulat, mais alors proconsul de la Gaule (63 av. J.-C.) reçut en présent, du roi des Suèves, des Indiens qui, partis de l’Inde pour leur commerce, avaient été jetés par les tempêtes sur les côtes de la Germanie. 5Ainsi les mers, entourant de toutes parts le globe qu’elles divisent, nous en enlèvent une partie, et le trajet n’est praticable ni de notre partie vers l’autre, ni de l’autre vers nous. Ces connaissances, si propres à mettre à nu la vanité des mortels, m’engagent à montrer, pour ainsi dire, en un tableau à quoi se réduit la grandeur de ce tout, quel qu’il soit, dans lequel s’agite l’ambition insatiable de chacun.

LXVIII.

1(LXVIII.) D’abord on semble compter une moitié pour la terre, comme si ce n’était pas faire tort à l’Océan ! Occupant toute la parte moyenne du globe, source et réservoir de toutes les eaux, même de celles qui s’élèvent sous forme de nuages, alimentant les astres eux-mêmes, si grands et en si grand nombre, dans quel vaste espace ne doit-il pas s’étendre ? Le domaine de cette masse énorme d’eau, rebelle à toute mesure, doit être infini. Ajoutez maintenant que, de la portion qui nous reste, plus de la moitié nous est enlevée par le ciel. Le ciel est divisé en cinq parties qu’on appelle zones : un froid rigoureux et des glaces éternelles assiègent toutes les contrées soujacentes[sic] aux deux zones extrêmes, c’est-à-dire qui entourent les deux pôles, l’un appelé boréal, l’autre opposé, appelé austral ; 2une obscurité perpétuelle y règne, l’influence des astres plus doux y est étrangère, et il n’y a d’autre lumière que la réflexion blanchâtre du