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PYRGOPOLINICE. J’y allais bien doucement.

ARTOTROGUS. Par Pollux, si vous y aviez été de toutes vos forces, vous auriez traversé avec votre bras le cuir, les entrailles et la mâchoire.

PYRGOPOLINICE. Ne parlons pas de cela à présent.

ARTOTROGUS. Par ma foi, vous n’avez pas besoin de me raconter vos exploits, je les connais assez. (A part.) C’est mon ventre qui prouve à mes oreilles tous ces ennuis ; il faut tout entendre jusqu’au bout, pour que mes dents ne s’allongent pas. Et il faut applaudir à toutes ses menteries.

PYRGOPOLINICE. Que voulais-je donc dire ?

ARTOTROGUS. Ah ! je sais ce que vous alliez dire. C’est la vérité, par Hercule ; je me souviens du fait.

PYRGOPOLINICE. Lequel ?

ARTOTROGUS. Celui qui vous plaira.

PYRGOPOLINICE. As-tu des tablettes ?

ARTOTROGUS. Vous voulez faire des recrues ? J’ai aussi un poinçon[1].

PYRGOPOLINICE. Tu entres merveilleusement dans ma pensée.

ARTOTROGUS. C’est mon devoir d’étudier votre caractère et de voler au-devant de vos désirs.

PYRGOPOLINICE. Te souviens-tu…

ARTOTROGUS. Si je me souviens ! Cent cinquante hommes en Cilicie, cent Sycolatronides, trente Sardes, soixante Macédoniens, tués par vous en une seule journée.

PYRGOPOLINICE. Combien cela fait-il en tout ?

ARTOTROGUS. Sept mille.

PYRGOPOLINICE. C’est bien cela : tu tiens les comptes comme il faut.

ARTOTROGUS. Je ne les ai pas mis par écrit ; je m’en souviens pourtant.

PYRGOPOLINICE. Par Pollux, ta mémoire est excellente.

ARTOTROGUS, à part. C’est à ta table que je la dois.

PYRGOPOLINICE. Tant que tu seras ce que tu as été jusqu’à ce jour, les bons morceaux ne te manqueront pas : toujours ton couvert sera mis chez moi.

ARTOTROGUS. Et en Cappadoce, si votre épée n’avait pas été émoussée, vous abattiez cinq cents hommes d’un seul coup.

PYRGOPOLINICE. C’était le reste de leur infanterie, s’ils avaient échappé.

  1. Pour écrire.