sires. Quel est cet ami dans l’embarras, que tu veux aider ? dis-le hardiment à ton père.
LYSITÉLÈS. C’est le jeune Lesbonicus, le fils de Charmide, qui demeure là.
PHILTON. Lui, qui a mangé ce qu’il avait et ce qu’il n’avait pas ?
LYSITÉLÈS. Ne lui en faites pas un reproche, mon père ; il arrive bien des choses dans la vie} qu’on le veuille ou qu’on ne veuille point.
PHILTON. Voici, ma foi, un mensonge, mon fils : cela n’est pas dans tes habitudes. Le sage, vois-tu, est lui-même l’artisan de sa fortune : aussi les choses ne tournent pas autrement qu’on ne veut, quand on n’est pas un mauvais ouvrier.
LYSITÉLÈS. L’ouvrier a fort à faire, s’il veut mener à bien l’ouvrage de la vie. Celui-ci est tout jeune.
PHILTON. Ce n’est pas l’âge, c’est le caractère qui donne la sagesse. C’est comme en cuisine : le sage est le mets, le temps l’assaisonne. Mais voyons, parle, que veux-tu lui donner ?
LYSITÉLÈS. Absolument rien, mon père. Seulement ne m’empêchez pas de recevoir ce qu’il me donnera.
PHILTON. Est-ce en recevant de lui que tu soulageras sa pauvreté ?
LYSITÉLÈS. Oui, mon père.
PHILTON. Je suis curieux, ma foi, d’entendre la recette.
LYSITÉLÈS. Soit. Connaissez-vous sa famille ?
PHILTON. Oui, c’est une de nos meilleures.
LYSITÉLÈS. Il a une sœur déjà grande et qui est encore fille ; je désire l’épouser, mon père.
PHILTON. Sans dot ?
LYSITÉLÈS. Sans dot.
PHILTON. L’épouser ?
LYSITÉLÈS. Oui, sans qu’il vous en coûte rien. De cette façon-là vous lui aurez rendu le plus grand service, et c’est le meilleur moyen de le secourir.
PHILTON. Moi, je souffrirais de te voir prendre une femme sans dot ?
LYSITÉLÈS. Il faut le souffrir, mon père ; en faisant ainsi vous acquerrez à notre famille une belle réputation.
PHILTON. Je pourrais te dire beaucoup de savantes maximes et je ne tarirais pas ; un vieux comme moi sait plus d’une histoire du temps jadis. Mais puisque je vois que tu veux procurer à notre maison de l’honneur et des amis, bien que je t’aie