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fâcher aujourd’hui. Le vin a un grand tort, il s’attaque d’abord aux jambes : c’est un perfide lutteur. Sur mon âme, me voilà en plein dans les vignes : une si bonne chère, si propre, si comme il faut, ah ! nous avons été joliment hébergés dans un joli endroit ! A quoi bon tant de détours ? C’est là ce qui fait qu’on aime la vie ; là sont toutes les voluptés, tous les agréments. Je me crois presque un dieu. Lorsqu’un amant tient dans ses bras sa maîtresse, que les lèvres se joignent, que deux langues se collent et s’enlacent, qu’un sein presse un autre sein, ou, si l’on aime mieux, que deux corps se replient… une blanche main offre la coupe de délices en buvant à la plus tendre affection… personne qui vous ennuie, qui vous importune, pas de propos à dormir debout… essences, parfums, rubans, couronnes éclatantes… car en fait de provisions rien n’était épargné, inutile de me le demander. De cette façon mon jeune maître et moi nous- avons passé une ravissante journée ; aussi avais-je accompli mon entreprise comme je le souhaitais, et mis l’ennemi en déroute. J’ai laissé les autres à table, buvant, faisant l’amour, avec leurs maîtresses, et la mienne aussi ; ils se donnent du bon temps. Quand je me suis levé, ils m’ont prié de danser. Je me suis mis en cadence comme ceci pour leur faire plaisir, selon les règles, car j’ai appris à fond la danse ionienne. J’ai donc exécuté un pas joyeux, comme cela, enveloppé dans mon manteau ; on m’applaudit, on me crie de recommencer. Je me mets encore à tourner de cette façon-ci ; en même temps, je me prêtais aux caresses de ma belle ; mais en faisant la pirouette, je tombe, et bonsoir la comédie ! Je fais un effort, pax ! j’ai presque embrené mon manteau. Ma chute les a, ma foi, bien fait rire. On me donne une coupe, je bois ; je change de manteau, je laisse l’autre, et je sors pour dissiper les fumées. Et maintenant je quitte mon jeune maître pour venir rappeler au vieux maître notre traité. (Il frappe.) Ouvrez, ouvrez, hé ! qu’on aille avertir Simon que je suis là.


SCÈNE II. — SIMON, PSEUDOLUS, BALLION.


SIMON. C’est la voix d’un fier drôle qui m’appelle. Mais qu’est-ce à dire ? Comment ! tu… Que vois-je ?

PSEUDOLUS. Sous cette couronne, votre esclave Pseudolus ivre. SIMON. Comme un homme libre, ma foi ! Mais voyez un peu cette tenue. Se trouble-t-il devant moi ? (A part.) Je ne sais