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CHARINUS. Croyez-vous que ce soit si certain ?

DÉMIPHON. Je vais de ce pas au vaisseau. La vente se fera là.

CHARINUS. Voulez-vous que je vous accompagne ?

DÉMIPHON. Non.

CHARINUS, à part. Voilà qui me déplaît.

DÉMIPHON. Tu feras mieux de t’acquitter de tes commissions.

CHARINUS. Vous m’en empêchez.

DÉMIPHON. Tu t’excuseras, tu diras que tu as fait tout ce que tu pouvais. Quant à venir au port, je te le défends.

CHARINUS. On obéira.

DÉMIPHON, à part. Allons, et faisons en sorte qu’il ne sache rien. Je n’achèterai pas pour moi, je donnerai commission à mon ami Lysimaque ; il a dit tantôt qu’il se rendait au port. Je perds mon temps à rester ici. (Il s’en va.)

CHARINUS. Ah ! c’est fait de moi, je suis égorgé.


SCÈNE IV. — CHARINUS, EUTYQUE.


CHARINUS. On dit que les Bacchantes ont mis Penthée en pièces : ce n’était que bagatelle, je pense, en comparaison des tourments dont je suis déchiré. Et je vis ! et je ne meurs pas ! quel charme a donc pour moi l’existence ? C’est résolu, je me rends chez un médecin, et là je m’empoisonne, puisqu’on m’enlève le seul bien qui me faisait désirer de vivre.

EUTYQUE. Un instant, de grâce, un instant, Charinus.

CHARINUS. Qui me rappelle ?

EUTYQUE. Eutyque, votre camarade, votre ami, votre plus proche voisin.

CHARINUS. Vous ne savez pas combien j’ai de chagrins à supporter.

EUTYQUE. Je le sais. J’ai tout entendu depuis la porte ; je suis au courant de l’affaire.

CHARINUS. Qu’est-ce que vous savez ?

EUTYQUE. Votre père veut vendre…

CHARINUS. Vous y êtes.

EUTYQUE. Votre maîtresse…

CHARINUS. Vous en savez trop.

EUTYQUE. Malgré vous.

CHARINUS. Vous êtes instruit de tout ; mais comment savez-vous que c’est ma maîtresse ?

EUTYQUE. Vous me l’avez dit vous-même hier.

CHARINUS. Et j’ai oublié que je vous l’avais dit !