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l’emportera pas ; le mien, mon père, offre de beaux deniers comptants.

DÉMIPHON. Il a beau offrir ; c’est moi qui l’aurai.

CHARINUS. Mais c’est lui qui a mis enchère le premier.

DÉMIPHON. Peu m’importe.

CHARINUS. Il donne cinquante mines.

DÉMIPHON. Il ne l’aura pas pour cent. Veux-tu enfin cesser d’enchérir pour me faire pièce ? Tu feras, ma foi, un beau coup de filet : le vieillard pour qui on l’achète n’est pas regardant. La tête lui tourne pour elle ; tu auras ce que tu demanderas.

CHARINUS. Mais le jeune homme pour qui je l’achète se meurt d’amour pour elle.

DÉMIPHON. Et mon vieillard, c’est bien autre chose encore, si tu savais.

CHARINUS. Jamais, je le jure, on ne vit et on ne verra un vieillard plus fou d’amour que le jeune homme à qui je m’intéresse, mon père.

DÉMIPHON. Tiens-toi en repos, te dis-je ; je ferai l’affaire pour le mieux.

CHARINUS. Y pensez-vous ?

DÉMIPHON. Qu’y a-t-il donc ?

CHARINUS. Je l’ai achetée sans garantie.

DÉMIPHON. Il la prend comme cela : laisse.

CHARINUS. Vous ne pouvez légitimement la vendre.

DÉMIPHON. J’y pourvoirai.

CHARINUS. D’ailleurs je l’ai de moitié avec un autre, et je ne sais s’il est ou non disposé à s’en défaire.

DÉMIPHON. Il est disposé, je le sais.

CHARINUS. Et moi, par Pollux, je crois qu’il y a quelqu’un qui ne veut pas.

DÉMIPHON. Qu’est-ce que cela me fait ?

CHARINUS. Il est juste pourtant qu’il soit maître de son bien.

DÉMIPHON. Dis-moi…

CHARINUS. Je l’ai de moitié avec un autre, et cet autre n’est pas ici maintenant.

DÉMIPHON. Tu réponds avant qu’on te fasse la question.

CHARINUS. Et vous, mon père, vous achetez avant qu’on vende. Je ne sais, vous dis-je, s’il veut ou non s’en défaire.

DÉMIPHON. Alors, si c’est pour le jeune homme qui t’a donné commission, ton homme consentira, et si c’est pour celui qui m’a dit d’acheter, il ne voudra pas ? Chansons ! Personne ne l’aura de préférence à celui pour qui je la veux. C’est bien certain.