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vint qu’elles avaient été volées ; il disait qu’elles étaient nées à Carthage, de parents libres.

MILPHION. Grands dieux ! l’agréable nouvelle que tu m’apprends là ! Mon maître Agorastoclès, qui a vu le jour dans la même ville, a été volé à l’âge de six ans, amené ici par son ravisseur et vendu à mon ancien maître. Celui-ci l’a adopté et en mourant lui a laissé sa fortune.

SYNCÉRASTE. Tout ce que tu dis là facilitera les choses ; il pourra les réclamer comme ses concitoyennes, demander leur mise en liberté.

MILPHION. Bouche close surtout.

SYNCÉRASTE. Il fera éprouver à notre homme un rude échec, s’il les lui enlève.

MILPHION. Je m’arrangerai même pour qu’il perde la partie avant d’avoir bougé une seule pièce. J’ai mon plan.

SYNCÉRASTE. Que les dieux t’entendent, et que je ne sois plus l’esclave d’un homme de son métier !

MILPHION. Eh ! je ferai en sorte, s’il leur plaît, que tu sois mon compagnon d’affranchissement.

SYNCÉRASTE. Puissent-ils y consentir ! As-tu encore besoin de moi ici, Milphion ?

MILPHION. Porte-toi bien, et bonne chance.

SYNCÉRASTE. Cela dépend de toi et de ton maître. Adieu, et rappelle-toi que je compte sur le secret.

MILPHION. Tu ne m’as rien dit ; bonsoir.

SYNCÉRASTE. Si on ne bat le fer tandis qu’il est chaud, ce sera comme si on chantait.

MILPHION. Le conseil est excellent ; c’est bien aussi ce qu’on fera.

SYNCÉRASTE. La matière est bonne, mets-y un bon ouvrier.

MILPHION. Te tairas-tu ?

SYNCÉRASTE. Je me tais et m’en vais. (Il sort.)

MILPHION. Bon débarras. Le voilà parti ! Les dieux immortels, veulent donc sauver mon maître et perdre ce vil marchand : quelle tuile va lui tomber sur la tête ! Et avant que le premier coup soit porté, le deuxième s’apprête. Mais je vais rentrer et dire tout cela à mon maître ; car si je l’appelais dehors pour lui répéter ce que vous venez d’entendre, ce serait bien maladroit. J’aime mieux l’ennuyer tête à tête au logis que vous tous ici. Dieux immortels, quelle déroute aujourd’hui pour ce Lycus ! Mais je n’ai pas besoin de tant m’amuser là. L’affaire est en train, ce n’est pas le moment de lambiner.