Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 2.djvu/224

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

AGORASTOCLÈS. C’est fait de toi, si tu ne me la rends aussi douce que peut être la mer, quand l’alcyon y lâche ses petits.

MILPHION. Comment s’y prendre ?

AGORASTOCLÈS. Prie, flatte, caresse.

MILPHION. J’y mettrai tous mes soins. Mais n’allez pas ensuite accueillir à coups de poing votre ambassadeur.

AGORASTOCLÈS. Non.

ADELPHASIE, à Antérastile. Partons à présent. (A Agorastoclès.) Vous m’arrêtez encore ? vous avez tort. Vous promettez beaucoup, mais vos promesses n’ont pas d’effet. Vous m’avez juré, non pas une fois, mais cent fois, de m’affranchir. Je vous attends, je ne me cherche pas d’autre ressource, mais je ne vois rien venir, et je suis esclave comme devant. (A Antérastile.) Viens, ma sœur. (A Agorastoclès.) Éloignez-vous.

AGORASTOCLÈS. Je suis perdu… Eh bien, Milphion ?

MILPHION. Ma volupté, mes délices, ma vie, ma félicité, ma petite prunelle, ma bouche mignonne, mon bonheur, mon baiser, mon miel, mon cœur, ma crème, mon petit fromage mollet.

AGORASTOCLÈS, à part. Je lui laisserai dire tout cela à ma barbe ? Ah ! je crève de rage, si je ne le fais traîner chez le bourreau au galop de quatre chevaux.

MILPHION. De grâce, ne soyez pas fâchée contre mon maître, faites cela pour moi. Si vous n’êtes plus en colère, je me charge de lui faire donner pour vous tant et plus ; il fera de vous une citoyenne libre d’Athènes.

ADELPHASIE. Laissez-nous aller. Que voulez-vous ? On oblige ceux qui vous obligent.

MILPHION. S’il vous a trompée autrefois, il sera sincère désormais.

ADELPHASIE. Allons, retirez-vous, fourbe.

MILPHION. J’obéis. Mais savez-vous ? Laissez-vous attendrir ; souffrez que je vous prenne par les deux oreilles, que je vous donne un baiser. Ma foi, je veux le faire pleurer, si je ne peux vous fléchir pour lui. Il me battra sûrement si je ne réussis pas ; j’en tremble. Je connais son tempérament violent et bourru. Aussi, ma volupté, par pitié, rendez-vous.

AGORASTOCLÈS. Je ne vaux pas trois oboles si je n’arrache les yeux et les dents au pendard. (Il le bat.) Tiens pour la volupté, tiens pour le miel, tiens pour le cœur, tiens pour la bouche mignonne, tiens pour le bonheur, tiens pour le baiser !