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DORDALE. Que les dieux et les déesses t’arrachent le corps et l’âme, et aussi à ton frère jumeau.

SAGARISTION. A lui, qui t’a écorché, à la bonne heure ; mais moi je ne t’ai rien fait.

DORDALE. C’est égal, que le mal qu’il m’a fait retombe sur toi !

TOXILE. Çà, si vous voulez, amusons-nous à ses dépens, il le mérite assez.

SAGARISTION. Cela n’est pas nécessaire.

LEMNISÉLÉNÉ. Cela ne serait pas bien de ma part.

TOXILE. Sans doute, il a été si accommodant quand je t’ai achetée !

LEMNISÉLÉNÉ. Cependant…

TOXILE. Pas de cependant ; prends garde à toi, et suis-moi. On doit m’obéir ; car ma foi, sans moi, sans mon assistance, il ne tardait guère à te faire descendre dans la rue. Mais voilà bien les affranchis ; s’ils ne tiennent pas tête au patron, ils ne seraient pas assez libres, assez dignes, assez comme il faut ; on veut lui résister, lui mal parler, répondre à ses bienfaits par l’ingratitude.

LEMNISÉLÉNÉ. Ah ! certes, vos bontés m’engagent à vous être soumise.

TOXILE. C’est moi qui suis ton patron, c’est moi qui lui ai donné de l’argent pour toi. En retour, je veux qu’on le mystifie.

LEMNISÉLÉNÉ. Pour ma part, j’y ferai tous mes efforts.

DORDALE. Ces gens-là se consultent et m’apprêtent je ne sais quelle méchanceté.

SAGARISTION, à Toxile et à Lemniséléné. Hé, vous autres !

TOXILE. Eh bien ?

SAGARISTION. Est-ce là ce Dordale qui achète des filles de condition libre ? Est-ce là ce ci-devant beau garçon ?

DORDALE. Qu’est-ce à dire ? Aïe ! il me donne un soufflet ! Je vous le ferai payer.

TOXILE. Nous t’avons fait payer et nous te ferons payer encore.

DORDALE. Aïe ! il me pince les fesses.

PEGNION. C’est de bonne guerre ; elles en ont vu bien d’autres.

DORDALE. Tu parles encore, petit bout d’homme ?

LEMNISÉLÉNÉ, à Dordale. Mon cher patron, de grâce, entrons, allons souper.