ACANTHION. Tout beau, vous avez encore bien des questions à me faire avant que je me laisse battre.
CHARINUS. Par Hercule, gare les coups, si tu ne parles ou si tu ne t’en vas.
ACANTHION. Voyez le bon câlin ; il n’y a personne d’aussi caressant que lui quand il s’y met.
CHARINUS. Eh ! je te prie, je te conjure, de me dire sur-le-champ de quoi il s’agit, puisque je vois qu’il me faut supplier un méchant esclave qui est à moi.
ACANTHION. Je ne le mérite peut-être pas ?
CHARINUS. Si fait vraiment.
ACANTHION. Je le crois.
CHARINUS. Je te prie, le vaisseau a-t-il péri ?
ACANTHION. Le vaisseau est en parfait état, ne craignez rien.
CHARINUS. Et les agrès ?
ACANTHION. Tout cela est à merveille.
CHARINUS. Alors dis-moi ce qui te faisait tout à l’heure courir après moi par toute la ville ?
ACANTHION. Vous ne faites que me couper la parole. Taisez-vous.
CHARINUS. Je me tais.
ACANTHION. Si je venais vous annoncer quelque chose de bon, vous me tourmenteriez joliment, à ce que je vois, puisque vous me pressez tant de parler pour entendre une mauvaise nouvelle.
CHARINUS. Par Hercule, je t’en conjure, fais-moi enfin connaître ce malheur.
ACANTHION. Je parlerai, puisque vous m’en priez. Votre père…
CHARINUS. Eh bien, mon père !
ACANTHION. Votre maîtresse…
CHARINUS. Ma maîtresse ?
ACANTHION. Il l’a vue.
CHARINUS. Il l’a vue ? ah ! malheur à moi ! Mais réponds.
ACANTHION. Interrogez.
CHARINUS. Comment a-t-il pu la voir ?
ACANTHION. Avec ses yeux.
CHARINUS. Mais de quelle façon ?
ACANTHION. En les ouvrant.
CHARINUS. Va te faire pendre ! tu plaisantes quand ma vie est en jeu.
ACANTHION. Comment donc, je plaisante en répondant à vos questions ?