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GRUMION. Par Pollux, je crois que ce nom sera bientôt le tien.

TRANION. En attendant, pourvu que je vive comme je fais, je me soucie peu de ton bientôt.

GRUMION. Oui ; mais sache bien ceci, les ennuis viennent beaucoup plus vite que ce qu’on désire de tout son cœur.

TRANION. Ne m’assomme pas : va-t’en à la ferme, décampe. Ne t’y trompe point, tu ne me retiendras pas une minute de plus.(Il s’en va.)

GRUMION. Voyez comme il part, sans plus se soucier de ce que je viens de lui dire. Dieux immortels, j’implore votre secours ; faites que notre vieux maître absent depuis trois ans revienne au plus vite, avant que tout soit dissipé, maison et terres ; car s’il n’arrive pas, il en reste à peine pour quelques mois. Et maintenant je retourne aux champs ; car j’aperçois le fils de mon maître, ce jeune homme si sage autrefois, et à pré sent si mauvais sujet.



SCÈNE II — PHILOLACHÈS.


J’ai bien pensé, bien réfléchi, j’ai formé dans mon esprit mille raisonnements, j’ai roulé et discuté longuement dans ma tête, si j’en ai une, cherchant à quoi peut ressembler l’homme, une fois qu’il a vu le jour, et quelle image il représente. Je compare l’homme venu au monde à une maison neuve : je vais vous donner mes raisons ; cela ne vous parait pas vrai, mais je vous amènerai cependant à le croire. Oui, j’établirai que ma comparaison est juste. Et vous-mêmes, j’en suis sûr, quand vous m’entendrez, vous ne direz pas autrement que moi. Écoutez donc mes raisonnements, je veux que sur ce point vous en sachiez autant que moi-même. Quand une maison est bâtie, faite et achevée comme il faut, selon les règles, on loue l’architecte, on approuve son ouvrage. Tout le monde désire en avoir une pareille, à quelque prix, que ce soit, et l’on ne plaint pas sa peine. Mais si elle est habitée par un vaurien sans soin, un malpropre, un lâche avec des serviteurs fainéants, aussitôt la maison se gâte, toute bonne qu’elle est, parce qu’elle est mal entretenue. Et puis, voici ce qui arrive souvent : un ouragan vient, brise les tuiles, la toiture ; le maître négligent ne veut pas en remettre. Survient la pluie, elle détrempe les murs, perce à travers les plafonds ; l’humidité pourrit la charpente. Voilà une maison devenue inhabitable, et ce n’est pas la faute de l’archi-